Clarifier l’organisation des territoires

Quartier, ville, communauté d’agglomération, pays, département, région, nation, Union européenne : pas moins de huit niveaux d’organisation administrative et politique peuvent concerner la vie du citoyen. Le résultat de ce foisonnement institutionnel est une quasi impossibilité pour la personne non avertie de repérer les lieux de décision. La démocratie est affaiblie dès lors que l’électeur n’est plus en situation de cerner les responsabilités de ses mandants.

Pour remédier à cette situation, la voie de la clarification des compétences de chaque niveau a été testée en 1982. Très rapidement, les collectivités territoriales, bénéficiant de la plus grande bienveillance de l’Etat, ont mis en échec les tentatives de spécialisation par niveau d’organisation. La leçon mérite d’être retenue. Reste une autre voie qui requiert une très forte volonté politique : la réduction du nombre de niveaux. La recherche de performance, l’exigence de démocratie plaident pour une organisation administrative allégée enfin adaptée à la réalité d’une France devenue urbaine.

Elire au suffrage universel direct les membres des établissements publics intercommunaux

La Loi Chevènement de 1999 a été un puissant accélérateur de la coopération intercommunale1. Les transferts de compétences des communes vers les communautés de communes ou d’agglomérations donnent aujourd’hui à ces dernières un poids très important. Les budgets de ces établissements publics sont aujourd’hui sensiblement supérieurs à ceux de villes moyennes voire parfois de grandes villes.

Le citoyen ne peut plus demeurer à l’écart de la désignation directe de ses mandants au sein d’institutions où sont prises aujourd’hui les décisions stratégiques sur sa vie. Si les craintes légitimes des défenseurs de l’identité communale ne sauraient être rejetées d’un revers de main, elles ne doivent cependant pas conduire à écarter le principe du suffrage universel direct des membres des Etablissements Publics Intercommunaux.

Moderniser la fiscalité locale pour la rendre plus équitable

Le risque d’une inégalité entre les territoires est souvent mis en avant par les tenants de la centralisation. Il est exact que la péréquation des recettes entre les territoires, aujourd’hui très insuffisante, est facteur d’inégalité. La décentralisation ne peut qu’être facteur d’injustice si les écarts de richesse fiscale ne sont pas réduits, si l’hétérogénéité des charges n’est pas mieux prise en compte.

Les rapports d’experts se sont empilés les uns sur les autres au fil du temps, les données du problèmes sont bien connues, l’heure est à la décision. Les pouvoirs publics ont jusqu’ici renoncé à modifier en profondeur la fiscalité locale, craignant les levées de boucliers qui résulteraient de transferts de fiscalité entre contribuables ou entre territoires. Mais peut-on accepter le maintien d’un dispositif devenu totalement inexplicable tant sa complexité est grande, et surtout profondément injuste ? Assurément non !

Moderniser les règles de gestion des ressources humaines

Un premier niveau de lecture du rapport 2003 du Conseil d’Etat donne une image très positive des textes qui régissent la Fonction Publique Territoriale. La réduction du nombre de corps, l’organisation en filière, les modes d’élections des représentants du personnel aux commissions administratives paritaires, la proximité de la décision sont des atouts incontestables. Ils sont toutefois très insuffisants pour promouvoir une véritable gestion des ressources humaines. Le choc démographique qui se profile va accentuer la concurrence pour attirer les talents. C’est l’occasion de revoir certaines règles statutaires en conjuguant imagination, courage et sens des responsabilités. Alléger les règles du concours, favoriser l’appel aux personnes qualifiées issues du secteur privé, reconfigurer les formations initiales, privilégier les formations tout au long de la vie professionnelle, adapter le système de rémunération pour mieux récompenser les compétences et l’investissement professionnel sont autant d’orientations qui s’imposent. A défaut de révisions parfois radicales, la Fonction Publique se videra progressivement de sa substance, entre appel aux contractuels et externalisation des missions.

Garantir l’impartialité de l’administration locale

La décentralisation est marquée, et c’est un des éléments de sa richesse, par la proximité entre les élus et la population. C’est aussi le lieu d’une forte proximité entre élus et fonctionnaires, suscitant crainte de clientélisme ou de confusion des rôles. Les collectivités gagneraient au début de chaque mandat, à l’instar de ce qui se fait trop rarement aujourd’hui, à élaborer une charte précisant les relations entre les élus et l’administration. Votée par le conseil municipal et signé par l’exécutif et le directeur général des services, elle offrirait un socle privilégié garant de la loyauté de l’administration vis-à-vis du pouvoir démocratiquement élu, garant également de l’impartialité d’une administration au service du public.

1 : La loi relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale, dite loi Chevènement, encourage une forme fédérative d’intercommunalité, à fiscalité propre (taxe d’habitation, taxes locales, taxe professionnelle), avec la définition de trois types d’établissements publics de coopération intercommunale (E.P.C.I.) : la communauté de communes, la communauté urbaine et la communauté d’agglomération. Les compétences accordées aux communautés urbaines ont été renforcées, les compétences accordées aux communautés d’agglomération sont particulièrement intégrées. La taxe professionnelle unique est désormais ouverte aux trois formules de l’intercommunalité. Elle est obligatoire pour les communautés d’agglomération et les nouvelles communautés urbaines, optionnelle pour les communautés urbaines existantes et les communautés de communes. Les établissements publics de coopération sont dotés de la personnalité morale et de l’autonomie financière ; il ont donc leurs propres moyens d’action ; ils s’administrent librement et peuvent disposer de personnel propre dont ils assument la gestion ; leurs décisions sont des décisions administratives qui relèvent du contrôle de légalité exercé par le préfet et de la juridiction administrative. Les travaux qu’ils réalisent sont des travaux publics. (Ndr)