Comme l’écrivaient Thierry Pech et Philippe Askenazy dans une tribune récente (Libération, 30 septembre), « il y a des livres dont le succès est plus intéressant que le contenu ». Pourquoi, en effet, ce petit livre rapidement lu a-t-il connu ces derniers mois un succès médiatique aussi important ? L’auteur, Corinne Maier, cadre à temps partiel à EDF, propose ni plus ni moins de « gangrener le système de l’intérieur » et préconise la paresse comme moyen d’y parvenir.

Puisque l’entreprise n’offre aucune possibilité d’épanouissement, dit-elle, désengageons-nous de notre travail – tout en continuant à percevoir un salaire – et faisons semblant de travailler. En d’autres termes, gardons notre énergie pour faire ailleurs ce qui nous intéresse vraiment : et l’auteur prêche d’exemple, en consacrant le reste de son temps à la psychanalyse et l’écriture.

Ce livre a l’honnêteté de revendiquer ouvertement son parti pris cynique. Il force le trait et donne une image caricaturale de l’entreprise et des « prototypes » de cadres : dirigeants malhonnêtes, managers inutiles et cadres moyens dociles. En fait, il a bénéficié d’une formidable publicité lorsque la direction d’EDF a menacé de sanctionner son auteur. A l’étranger, Bonjour paresse a conforté l’image d’une France où l’on ne travaille pas, et même le prestigieux quotidien britannique Financial Times a consacré un article au livre.

On peut soupçonner que tout cela n’est qu’une pose intellectuelle, une pseudo provocation. Pour pouvoir se payer le luxe de ne rien faire au travail, encore faut-il en avoir un, et les trois millions de personnes en recherche d’emploi apprécieront à sa juste valeur ce conseil désabusé.

Pour autant, ce livre vient dans un contexte où la démotivation des salariés, y compris les cadres, devrait sérieusement interroger les employeurs, et pas seulement en France. Une récente enquête européenne, réalisée par Towers Perrin, révèle l’absence d’engagement d’une majorité de salariés à l’égard de leur entreprise, conséquence, selon eux, du manque de reconnaissance et d’écoute de la part de leur hiérarchie. On peut donc lire ce livre avec recul et y voir un appel à réagir contre un certain discours managérial qui utilise les termes d’autonomie, de responsabilité ou de créativité comme des leurres pour masquer la dureté croissante du monde du travail.

Et pour finir sur une note optimiste, sachez que Corinne Maier¸ lorsqu’elle a reçu la lettre de son employeur, l'a remise à un syndicat et lui a demandé de l'aider dans sa défense…

Entreprendre autrement. L’entreprise au service de tous. Alternatives économiques, 2004. 176 pages, 9 euros.

Les Placements éthiques. Comment placer utilement son argent. Alternatives économiques, 2004. 192 pages, 9 euros.

Se défendre aux prud’hommes. Edition 2005. Prat, 2004. 216 pages, 22 euros.

Marc Dennery. Réforme de la formation professionnelle. Les clés pour réussir sa mise en œuvre. ESF, 2004. 224 pages, 22 euros.

Martine Compagnon et Didier Noyé. Stimuler la créativité de votre équipe. Insep consulting, 2004. 48 pages, 8 euros.

Joëlle Lévy-Berger et Didier Noyé. Manager en transversal. Le management indirect. Insep consulting, 2004. 48 pages, 8 euros.

Philippe Korda. Réussir vos entretiens de management. 14 situations d’entretien essentielles. Insep consulting, 2004. 48 pages, 8 euros.

Carl Paolin. Licenciement : tous vos droits. Edition 2005. Prat, 2004. 264 pages, 22 euros.

Jean-Louis Chauchard. Réussir le dialogue social. Editions d’organisation, 2004. 120 pages, 17 euros.

Benoît Ferrandon (dir.). Comprendre le management. La Documentation française, 2004. 96 pages, 9,30 euros.

Marie-Anne Garigue et Vincent Bussière. Les Clés du CAC 40. Les grandes entreprises françaises à la loupe. Prat, 2004. 556 pages, 24 euros.