C’est Maurice Thorez, secrétaire général du Parti communiste français et ministre de la Fonction publique, qui signe le 19 octobre 1946 le statut général des fonctionnaires. La prise en compte du mérite individuel n’est pas absente de ce statut, mais elle est étroitement encadrée. Un avancement d’échelon plus rapide est possible avec le principe de la notation, mais il est limité par le contingentement des quarts de points. La promotion par listes d’aptitudes et tableaux d’avancement constitue un second mode de reconnaissance des mérites, mais elle est restreinte par les contraintes budgétaires. Pour les agents, cette prise en compte du mérite se traduit par un gain indiciaire ou indemnitaire. Ces textes n’ont jamais été remis en cause par la suite. Quand en 1982 Anicet Le Pors revisite le statut de 1946, il conserve la notation, les listes d’aptitude, les tableaux d’avancement… Ce n’est qu’à la fin des années 1980 que l’évolution des modes de management a remis à l’ordre du jour l’idée d’une « rémunération au mérite » aux modalités nouvelles.

Mérite ou reconnaissance ?

L’inspiration en est pour partie anglo-saxonne, encore qu’il faille ici faire la distinction entre les Anglais, d’une part, et d’autre part des Américains plus proches de nous qu’il n’y paraît. Aux États-Unis, en effet, le salaire au mérite ne s'applique qu’à environ 8 500 hauts fonctionnaires dont la part des primes est modulée. Les salaires sont fixés unilatéralement par le gouvernement, sans consultation avec les syndicats (sauf pour le secteur des Postes). La loi prévoit de maintenir une certaine équivalence avec les salaires du privé.

En Grande-Bretagne, en revanche, sous l'impulsion de Margaret Thatcher, la modulation des augmentations de salaires des fonctionnaires selon la perform