Depuis les années 1980, pour résoudre le problème du chômage de masse en France, les pouvoirs publics se sont focalisés sur le développement de « l’employabilité » des individus.

La rhétorique de l’employabilité

Les cadres ont été les premiers à bénéficier de ces outils d’accompagnement personnalisé, à travers les bilans de compétences et différents outils d’aide à la recherche d’emploi, car l’Apec s’est investi sur ce domaine bien avant l’ANPE. Cet accompagnement individualisé du chômeur est désormais étendu à l’ensemble des catégories. Avec la mise en place du PARE en 2001 mais aussi des cellules de reclassement en cas de restructuration, la dimension « active » des politiques d’emploi s’est surtout concentrée sur les personnes afin de les rapprocher de l’emploi. La philosophie sous-jacente de l’ensemble de ces outils est qu’il faut faciliter les transitions professionnelles entre emplois (salariés ou indépendants) en responsabilisant les personnes de leur devenir, en les aidant à construire un projet réaliste de réinsertion professionnelle. Les transitions professionnelles seraient supportées par une boîte à outils désormais bien intégrée dans notre paysage mental et institutionnel, principalement bilans de compétences et techniques de la recherche d’emploi – CV, entretiens, réseaux –, ainsi que le retour par la formation continue – diplômante ou non.

Dans Le nouvel esprit du capitalisme (Gallimard, 1999), Luc Boltanski et Eve Chiapello montrent que cette nouvelle rhétorique pose des problèmes d’équité et de sécurité. On oublie souvent en effet que « l’employabilité » était au départ une notion statistique, développée notamment par Raymond Ledrut dans Sociologie du chômage (PUF, 1966) et définie comme « l’espérance objective ou probabilité plu