Le métier protège le travailleur. En voulant mobiliser la personnalité entière et en utilisant comme ressource que le registre personnel, le travailleur est mis à nu et devient vulnérable. L’entreprise exige une adhésion totale de la personne aux dépens de sa professionnalité. D. Linhart propose un retour sur les théories tayloriennes, en passant par l’atelier des méthodes et aux usines fordiennes. L’organisation scientifique du travail avait pour but de déposséder l’ouvrier spécialisé de son savoir en le transformant en exécutant soumis. Ce que le renouvellement managérial des années quatre-vingt n’a pas tout à fait remis en cause. L’intensification du travail, la fragilité des collectifs agencent une métamorphose identitaire du salarié. Les stratégies de séduction managériales se déploient pour conquérir les esprits : chartes éthiques, codes de conduite et manuels de déontologie font l’apogée de la disponibilité sans limite et du dépassement de soi.

La désillusion guette : l’autonomie recherchée devient déstabilisante. Une « précarisation subjective » s’installe et le travail du salarié est jugé à travers l’individu. Comment lutter contre cette déstabilisation permanente ? « Il suffirait, pour que les choses changent, d’être prêts à nous convaincre de la vertu du débat, de la confrontation des idées, de la critique… ». Théorie intéressante mais, comme le décrit le premier chapitre, récupérée aussi en raison de sa radicalité. Quand le questionnement devient incantatoire, son intérêt se trouve diminué. C’est dommage, car le parallèle d’un renouveau de Taylor, sous forme numérique par exemple, permettrait tout à fait de passer au crible le monde moderne du travail.