L’instauration d’une protection généralisée est toujours le fruit d’une construction sociale longue et complexe. Il en est de même pour les groupes professionnels quand ils sont amenés à réfléchir à un système d’assistance de type corporatif.

Le cas des cadres nous est ici précieux à plus d’un titre pour comprendre le processus qui a été mis en œuvre avant que ceux-ci parviennent à protéger leur vieillesse. En fait, cette étape de réflexion est bien plus difficile qu’on ne l’imagine. Cela suppose d’avoir perçu le vieillissement comme un « problème » avec des effets négatifs, auxquels on va tenter de pallier. Dès lors, à quel moment ce groupe a-t-il cherché des solutions et comment ?

Pour mieux comprendre le chemin parcouru, il est nécessaire de revenir sur les traces de cette prise de conscience dont le point de départ se situe au XIXe siècle au moment où se forme le groupe des ingénieurs civils. A cette date, ces derniers ne bénéficient pas de la retraite des fonctionnaires et des militaires comme leurs homologues, les ingénieurs d’Etat1.

Les ingénieurs civils sont alors démunis de toute protection sociale généralisée. Ce qui, pour l’heure, ne pose pas encore de problème. Un relatif consensus s’est établi sur le fait que cette question est du ressort individuel, chacun étant libre et responsable de sa prévoyance. En fait, la vieillesse des ingénieurs civils ne commencera à être réellement perçue comme un risque potentiel qu’avec la montée d’une conscience salariée au début du XXe siècle.

Un esprit de philanthropie avec les caisses de secours

Pour pallier à cette carence, les associations amicales des anciens élèves des écoles d’ingénieurs civils vont étendre progressivement leur champ d’intervention à partir du milieu du XIXe siècle, dans un esprit d