C'est la mode depuis quelques années : le grand-père raconte sa vie à un écrivain public qui couche cela sur le papier - à la première personne, dans un style à mi-chemin entre l'oral et l'écrit - à l'usage des petits-enfants. Celui qui se prête à cet exercice est l'homme de l'OPA sur Saint-Gobain et de « Modernisation, mode d'emploi », le patron qui soutint les grévistes de Lip et le maniaque des produits Danone. Il raconte gentiment sa vie, l'enfance d'un fils de famille lyonnais jaloux d'un cadet beau et brillant, une bigamie cinquantenaire assumée avec décontraction, une curiosité sociale alliée à un grand sens commercial et surtout la construction, à partir d'une fabrique de verre et d'une participation dans les eaux d'Evian, d'un groupe international de l'alimentation. C'est un patron qui parle de ses « affinités » avec les responsables nationaux de la CFDT lors de l'histoire de Lip, un homme qui dit avoir « commencé à penser à sa retraite » à « un âge raisonnable », c'est-à-dire en approchant les quatre-vingts ans et a laissé son fauteuil à l'un de ses fils.

Tout n'est pas dit ni même suggéré. On aurait aimé en apprendre un peu plus sur le monde patronal, par exemple. Mais c'est plaisant à lire et pas dénué d'une certaine coquetterie dont le titre est une bonne illustration car enfin la classe dont il est sorti dernier était Sup de Co Paris.

Dans un dossier très complet, la revue «SANTÉ ET TRAVAIL» - n° 27 - Avril 1999 - publiée par la FNMF présente les principaux enseignements d’enquêtes relatives aux conditions de travail des salariés. Ces éléments ne peuvent être ignorés des militants syndicaux, en particulier des membres de CHSCT mais aussi des élus de CE qui reçoivent le rapport du médecin du travail ou encore des délégués syndicaux qui ont à négocier la RTT avec le souci de préserver les conditions de travail.

Nicolas Sandret, médecin-inspecteur à la médecine du Travail en Ile-de-France souligne l’intérêt des médecins du travail pour toutes ces enquêtes puisqu’ils sont eux-mêmes à la fois demandeurs, utilisateurs et producteurs de données chiffrées.

Ainsi l’enquête SUMER (Surveillance Médicale des Risques professionnels) a mis à contribution 1200 médecins du travail qui ont consulté près de 50 000 travailleurs de tous les secteurs professionnels. Cette enquête a mis en évidence par exemple que 9 % de salariés sont exposés à des agents cancérogènes et que près de quatre millions de salariés côtoient le risque chimique dans leur travail. Elle confirme aussi que la pénibilité physique n’a pas disparu, station debout, gestes répétitifs, manutention manuelle concernent 30 à 40 % des salariés.

Une enquête de la DARES (Direction de l’Animation de la Recherche et des Etudes Statistiques du ministère du Travail) en 1998 confirme la tendance à l’intensification du travail, tendance déjà observée dans celle de 1991. Progression du travail à la chaîne, gestes répétitifs, exigence du « client », toutes ces contraintes sont en augmentation, voilà pourquoi le temps de travail ne se mesure pas seulement en volume mais surtout en contenu et en qualité.

L’INSEE n’est pas en reste avec une enquête sur la mortalité des salariés suivant leurs catégories socioprofessionnelles. Ainsi dans la tranche de 35 à 65 ans, un ouvrier a deux fois plus de risque de décéder qu’un cadre. Mais si de mauvaises conditions de travail affectent l’espérance de vie, l’absence de travail et l’exclusion professionnelle sont aussi pénalisantes pour la santé.

Le grand chantier confédéral CFDT « le travail en questions » est présenté comme une expertise syndicale donnant l’occasion à des équipes syndicales de défricher par eux-mêmes les conditions de vie et de travail de leurs collègues. Ainsi 60 000 salarié(e)s ont été interviewé(e)s par environ 6 000 militants de 35 branches professionnelles. Rappelons que la FCE, de son côté, a labouré ces dernières années les champs du temps de travail (12 000 réponses), du stress professionnel et des conséquences des nouvelles organisations du travail (500 réponses chacune). Et en ce moment même, c’est l’enquête sur le travail posté qui mobilise nos équipes syndicales !

D’autres enquêtes s’intéressent aux conséquences du vieillissement ou à celles du travail précaire ou encore à la situation des travailleurs de la sous-traitance du nucléaire.

Ce dossier de la revue « Santé et Travail » est donc un véritable outil pour les militants syndicaux : achetez-le, ou faites-le acheter par votre mutuelle ou CE.