L’Europe sociale est un objet politique mal identifié. Le dialogue social européen trouve son origine dans le Traité de 1957, fait en effet partie intégrante du modèle social européen, sans que ce dernier soit clairement défini. Il faut un témoin, un acteur : Jean Lapeyere, ancien Secrétaire général adjoint de la Confédération européenne des syndicats (CES) et notamment ex-secrétaire national FGMM CFDT, en fait un bilan historique très bien documenté.

Il faut retracer la situation sociale au niveau européen avant 1985 et le « moment Delors », la structuration du dialogue social et l’adoption de la Charte des droits sociaux fondamentaux des travailleurs fin 199, le rôle des partenaires sociaux dans la construction européenne ; la transformation des lobbyistes ; la poursuite de la dynamique de avec des succès et des échecs notamment dans le domaine du travail intérimaire ; des rapports de synergie entre les syndicats et les ONG pour conclure avec le souhait d’un nouveau souffle avec une Commission plus engagée aujourd’hui.

Si le dialogue européen est décrit au niveau de l’Union, l’auteur dépasse le cadre géographique et rappelle que la Charte sociale du Conseil de l’Europe, seul traité international en matière des droits sociaux comporte des dispositions contraignantes et que les partenaires sociaux jouent un rôle fondamental. Les dispositions du traité demeurent fondamentales et sont primordiales, notamment à l’heure des grands flux migratoires, entre autres en relation avec le regroupement familial. Dans le cadre de l’Europe élargie une certaine place aurait pu être consacrée au rôle des partenaires sociaux dans les auditions lors de certaines conférences des ministres spécialisés organisées par le Conseil de l’Europe, notamment dans le domaine de la sécurité sociale et à leur influence sur le dialogue social au niveau européen.

Notons également que l’auteur salue le rôle joué par son prédécesseur, François Staedlin, dans le cadre du syndicalisme européen, durant dix ans auprès de la CES. La détermination et le pragmatisme irriguent les contributions de F. Staedlin à la défense du progrès social en Europe, et dont je peux témoigner de leur importance, notamment par exemple dans le cadre du système de contrôle de la Charte sociale, feront partie de l’histoire du syndicalisme en Europe.

Au final, une publication qui constitue une référence pour qui s’intéresse au progrès social. Bien que l’intérêt relatif au syndicalisme semble être en recul ainsi que le nombre des travailleurs syndiqués dans certains pays, le rôle des partenaires sociaux et notamment des travailleurs dans la création d’une Europe vivable et socialement humaine devient de plus en plus important. Ce qui impose une évolution d’un syndicalisme. C’est tout l’intérêt de ce livre de rappeler en filigrane que l’Europe sociale vit des convictions de ses acteurs.