Un premier déséquilibre se révèle dans la plainte diffuse mais massive d’un manque de reconnaissance.

L’émergence d’une plainte de reconnaissance

Elle renvoie à la perception d’un écart croissant entre les modes d’engagement requis, de plus en plus exigeants (engagement de soi sans compter, disponibilité importante comme norme de carrière…) et les conditions d’une reconnaissance des efforts engagés (rétribution plus incertaine car davantage liée à des critères qualitatifs, mais aussi plus contingente en fonction des réorganisations). La construction d’un parcours professionnel est moins linéaire que par le passé et dépend, avec la gestion des compétences, d’une logique réputationnelle, mettant les cadres en concurrence les uns avec les autres.

Le manque de reconnaissance concerne aussi les modes de mobilisation au travail et se traduit par le déni des formes d’engagement au travail. Ce sont alors les conditions de l’activité de travail qui font l’objet d’un défaut d’appréciation « à leur juste valeur ». Il y a alors un décalage entre la fiche de poste, la lettre de mission et la manière dont les cadres viennent investir leur fonction pour remplir leur rôle. Le surinvestissement représente à cet égard une modalité concrète de déni de reconnaissance.

Un autre degré de cette plainte concerne la responsabilité. La diversité des critères de jugement de la performance fait du travail une épreuve risquée, où l’injonction à l’autonomie peut se retourner sous la forme d’un contrôle, mettant en évidence les inévitables transgressions des règles prescrites. En réalité, c’est sur le sens de la mission que porte le déficit de reconnaissance et donc sur la manière de réaliser un travail de qualité. Il y a là une demande de réassurance institutionnelle sur le sens et le bien fondé des décisions.