Délibérer est affaire de temps, mais tout n’est-il pas joué d’avance ? « Quand je délibère, écrit Sartre dans L’Etre et le Néant, les jeux sont faits. Et si je dois en venir à délibérer, c’est simplement parce qu’il entre dans mon projet originel de me rendre compte des mobiles par la délibération plutôt que par telle ou telle autre forme de découverte. » Délibérer ne serait pas le moment du choix, mais celui de sa justification. La délibération n’apporterait à la décision du sujet qu’un peu plus de conscience sur ce qui l’anime. Mais n’est-ce pas déjà quelque chose lorsqu’il s’agit de mettre en œuvre son choix, de présenter sa décision et d’en expliquer les motifs ? Cette seule raison suffirait à rendre la délibération nécessaire.

La fin et les moyens

Ainsi, la délibération nous rappelle un point essentiel dans l’art de décider : le choix n’est pas la décision. Là, deux tentations surgissent. Celle de remettre à plus tard le moment de faire son choix, sans prendre garde qu’il y a une limite de temps après laquelle ce seront d’autres ou bien les événements qui décideront ; et à l’inverse celle de décider trop vite, sans prendre le temps de poser les termes du choix et de confondre la promptitude qui est une qualité, avec la précipitation qui sera souvent une faute. Dans les entreprises, n’est-il pas presque toujours possible de se donner du temps, de fixer soi-même le délai de la réponse à faire ? Que ce soit quelques dizaines de minutes, un jour, quarante-huit heures ou davantage ?

Il faut du temps pour préparer son choix et pour mener sa délibération ; pour mûrir son choix et prendre sa décision.

En traitant des méthodes de décision, les sciences de gestion ne nous paraissent pas toujours prendre en compte cette question du temps nécessaire au choix. Ainsi,