Les maladies chroniques, reconnues comme un handicap depuis la loi du 11 février 2005, recouvrent un ensemble de situations diverses. Définies par l’organisation mondiale de la santé comme « un problème de santé qui nécessite une prise en charge sur plusieurs années », elles évoluent « plus ou moins rapidement pendant plusieurs mois au minimum, au rythme de complications plus ou moins graves » et se traduisent souvent « par un risque d’invalidité » ou « par un handicap temporaire ou définitif ».

Maladies chroniques : des réalités diverses

Le diabète, la sclérose en plaques, la polyarthrite rhumatoïde, la maladie de Parkinson, l’épilepsie, l’asthme, la myopathie, le VIH-sida et certaines hépatites sont des exemples de maladies chroniques. Les répercussions de ces maladies sur la vie sociale et professionnelle ne sont pas les mêmes pour tous et chaque cas reste particulier. Chaque personne a son propre ressenti psychologique, sa propre résistance physique. Pour certaines, les périodes de soins peuvent alterner avec des périodes pendant lesquelles elles sont capables de travailler. Par ailleurs, chaque maladie connaît des évolutions spécifiques, plus ou moins prévisibles, mais qui ne vont pas nécessairement dans le sens d’une aggravation.

Des pathologies de plus en plus fréquentes

Dans les années à venir, les maladies chroniques seront une préoccupation majeure des entreprises, tant en termes de gestion des ressources humaines et d’organisation du travail qu’en termes de productivité. Deux raisons essentielles à cela. L’une, démographique, est l’augmentation du nombre de personnes atteintes d’une maladie chronique. Augmentation qui s’explique elle-même par le recul de l’âge de la retraite, avec pour conséquence le vieillissement de la population active. Une seconde raison, d’ordre médical, tient aux progrès du dépistage et de la prise en charge thérapeutique des maladies chroniques : grâce à des traitements compatibles avec une vie professionnelle, les personnes malades veulent et peuvent conserver leur activité le plus longtemps possible et dans les meilleures conditions. D’où la nécessité, pour une bonne intégration dans l’entreprise, que l’employeur et les collaborateurs soient informés sur les maladies chroniques et leur impact sur la vie professionnelle.

Des maladies mal connues dans l’entreprise

Les maladies chroniques ont en commun d’être fréquemment à l’origine d’un handicap « invisible » qui se caractérise surtout par une grande fatigabilité et des arrêts maladie répétés courts et souvent nécessaires pour suivre le protocole de soins. Si la personne atteinte d’une maladie chronique choisit de ne rien dire de son état de santé - ce qui est souvent le cas, par crainte d’être stigmatisée ou parce qu’elle -même a du mal à se reconnaître comme « handicapée »-, l’employeur et les collègues ne pourront jamais connaître la cause réelle de cette situation.

Or celle-ci risque de peser lourdement sur l’organisation des tâches et dans les relations au travail : les collaborateurs amenés à suppléer, sans explication, un collègue régulièrement absent peuvent ne pas comprendre et mal réagir face à cet état de fait. Inversement, pour pallier un éventuel retard ou éviter toute appréciation négative, la personne touchée par une maladie chronique pourra avoir tendance à se surinvestir dans son travail, avec en retour des risques aggravés pour sa santé, notamment par accumulation de fatigue.

L’enjeu de la reconnaissance du handicap

La mobilisation des aides et des services proposés par l’Agefiph peut faciliter l’intégration et le maintien dans l’emploi d’un collaborateur handicapé par une maladie chronique. Pour pouvoir en bénéficier, la personne doit être reconnue handicapée. Or, souvent, la demande de reconnaissance ne va pas de soi pour la personne, qui ne se perçoit pas elle-même comme handicapée : en effet, les conséquences de la maladie ne sont pas toujours visibles ni constantes. Le service de santé au travail et le médecin traitant, avec l’appui éventuel de l’employeur lorsqu’il a connaissance de la situation, ont un rôle à jouer pour aider le malade à prendre conscience de l’importance de faire reconnaître son handicap. Ils peuvent s’appuyer sur les arguments suivants : la reconnaissance du handicap n’est pas définitive ; elle est la condition indispensable pour bénéficier de conseils de spécialistes et d’aides qui permettront de trouver des solutions pour compenser le handicap et rendre compatibles la maladie et le poste occupé. Le plus souvent, les aménagements nécessaires sont d’ordre organisationnel. Ils visent à compenser la fatigabilité et à tenir compte des rythmes et des contraintes liés au traitement de la maladie.

Ainsi, l’aménagement des horaires, la possibilité de travailler à temps partiel en utilisant éventuellement le temps partiel thérapeutique ont pour objectif d’aider la personne handicapée par une maladie chronique à continuer d’exercer ses fonctions dans les meilleures conditions physiques et psychologiques possibles.

Anticipation et vigilance : les clés d’une intégration durable

Recruter, intégrer, maintenir dans l’emploi un salarié handicapé par une maladie chronique évolutive impose avant tout d’anticiper les évolutions prévisibles de la maladie et leurs conséquences en situation de travail.

Il convient aussi de rester vigilant sur la durée pour prévenir les arrêts maladie, identifier au plus tôt les difficultés du poste et prévoir le retour dans l’entreprise après un arrêt maladie. Cette veille mobilise le service de santé au travail, et également l’employeur, les partenaires sociaux, le responsable hiérarchique ainsi que tous les collègues susceptibles de repérer les difficultés d’un collègue malade. Ainsi, par exemple, des absences répétées de courte durée d’un salarié n’impliquent pas automatiquement un signalement au médecin du travail. Pourtant, en prenant l’initiative de l’alerter, l’employeur ouvre la possibilité d’identifier un problème potentiel et d’étudier les solutions qui permettront au salarié de conserver son emploi. De même, sensibiliser un collaborateur à l’importance d’une visite de pré-reprise, réalisée par le médecin du travail alors que l’arrêt maladie touche à sa fin, est un moyen efficace de faciliter son retour dans l’entreprise. Cette opportunité permettra d’identifier en amont les aménagements destinés à compenser le handicap et de les mettre en œuvre dès le retour du collaborateur.

Information, sensibilisation et anticipation de l’adaptation sont les attitudes clés pour réussir le maintien dans l’emploi d’une personne atteinte d’une maladie chronique invalidante. Ce qui suppose que cette personne ose parler de sa maladie et de ses répercussions, en toute transparence. Dès lors qu’elle ne se sent plus coupable ni obligée de se surinvestir pour « prouver » sa compétence, elle ne peut être qu’un facteur de cohésion dans une équipe.

Article extrait du numéro d’avril 2011 des Cahiers de l’Agefiph, intitulé : Travailler avec une personne handicapée atteinte d’une maladie chronique évolutive Pour recevoir les Cahiers de l’Agefiph, abonnez-vous sur www.abonnement.agefiph.fr