La globalisation financière s’est épanouie sur le reflux de l’inflation et sur les bouleversements géopolitiques issus de la destruction de l’empire soviétique. Elle a entraîné un choc en retour sur les démocraties occidentales, avec le triomphe du libéralisme en tant qu’idéologie totale se déployant dans trois champs :

Politique, en premier lieu : la hiérarchie entre le marché et le politique qui était établie dans le cadre de l’économie mixte keynésienne s’est inversée. La justification idéologique de cette inversion est la prétendue universalité de l’individu rationnel libéré des liens sociaux autres que le marché. Il en est résulté un abaissement de l’Etat, dont les décisions budgétaires (c’est-à-dire des choix collectifs démocratiquement élaborés) sont soumises au jugement des marchés financiers : l’Etat tend ainsi à être envisagé comme un agent économique parmi d’autres. Seconde conséquence : la conception de l’entreprise comme lieu d’intégration sociale a reculé.

Juridique, ensuite, avec le retour en force de la figure de l’actionnaire souverain, figure qui combine une théorie juridique de l’entreprise fondée sur le droit de propriété en tant que maîtrise souveraine d’un sujet (l’actionnaire) sur un objet (l’entreprise). Cette théorie justifie donc un droit absolu des actionnaires. L’exercice de ce droit met en œuvre le pouvoir des actionnaires en définissant une norme de gestion (gouvernement d’entreprise sous le contrôle des critères de performance évalués par les marchés financiers).

Financier, enfin, avec la promotion de la liquidité présentée comme idéal de la liberté économique. Des marchés de plus en plus diversifiés et interdépendants deviendraient dès lors le seul guide de l’allocation des ressources.

Les ressorts idéologiques et théoriques de ce système forment un tout cohérent, et on peut en entr