Peut-on comparer l’actuelle crise du logement avec celle qui avait éclaté au début des années 1950 ?

On peut tracer des perspectives de l’une à l’autre, mais elles ne sont pas de même nature. A l’époque, la France comptait 45 millions d’habitants, et il manquait 4 millions de logements : nous étions dans une phase de restructuration lourde de l’économie, avec l’exode rural et les enfants de paysans qui quittaient le village pour se faire ouvriers. Il restait encore 6 millions d’exploitations agricoles. Il y avait enfin une forte immigration, pour répondre aux besoins de l’industrie. A ces besoins quantitatifs s’ajoutaient des besoins qualitatifs : 60% des logements n’avaient pas les trois points d’eau (eaux usées, eau potable, douche). Il y avait même des bidonvilles.

Les partenaires sociaux se sont-ils emparés du sujet ?

Pas immédiatement. Le 1% logement est créé en 1953, mais les décisions se prennent ailleurs, au niveau politique. Les partenaires sociaux accompagnent financièrement les opérations. Très vite, la mécanique est lancée : pendant une vingtaine d’années, on va construire plus de 400 000 logements par an, dont 150 000 logements sociaux. Depuis les années 1980, ce rythme a sensiblement diminué, avec des chiffres de 300 000 logements dont 50 000 pour l’habitat social.

Cette diminution est liée à un changement de nature des aides au logement : à partir des crises pétrolières, l’Etat a estimé qu’il devait soutenir les ménages, en privilégiant les aides à la personne ; auparavant, on avait plutôt des aides à la pierre. En 1975, 13 milliards de francs sont dévolus aux aides à la pierre, pour 1,2 à la personne ; aujourd’hui, les aides à la pierre représentent 2 mi