La tendance expansive du salariat, forte durant la seconde moitié du XIXème siècle et le XXème siècle, se ralentit en raison du passage lent mais progressif de la civilisation de l’usine à celle de l’intelligence, grâce aux progrès des techniques de l’information et de la communication d’un côté ; de l’harmonisation de plus en plus effective de la protection sociale de l’autre.

Cette évolution ne peut qu’affecter à terme l’opposition quelque peu manichéenne entre contrat de travail et contrat d’entreprise. La dichotomie, ne laissant place à aucune autre qualification, a laissé croire que le bloc des indépendants était homogène, alors qu’il ne l’est pas davantage que celui des salariés. Par certains aspects, il y a plus de différences entre un ouvrier sans qualification et un cadre supérieur qu’entre celui-ci et un travailleur indépendant. Le « free lance » est sans doute trop facilement qualifié de chef d’entreprise exploitant en nom personnel ; mais il est, par contre, difficile de soutenir que les 1 700 000 travailleurs indépendants (hors statut agricole) sont tous des salariés qui s’ignorent.

C’est eu égard à ces considérations préliminaires qu’il convient d’analyser la tendance à l’harmonisation en matière de protection sociale (I) avant d’examiner les raisons, tirées des mutations actuelles du travail, qui conduisent à l’émergence de qualifications nouvelles (II).

I - Le statut social des travailleurs : vers l’harmonisation

A. Pendant longtemps, le contentieux de la requalification du salarié a été celui de l’accès à la protection sociale. Ceci était dû à l’absence de toute protection en faveur des travailleurs indépendants. Il en est résulté une tendance expansive du salariat, d’autant