Quels regards les sciences de gestion peuvent-elles proposer pour analyser les données de l’enquête CFDT auprès des cadres des fonctions publiques ? Nous voudrions mettre à contribution une approche cognitive de l’activité des managers : celle de la « confusion des mandats ». Elle consiste à s’intéresser à la façon dont les managers gèrent cette ressource rare qu’est leur attention. Après avoir introduit cette approche issue de travaux sur les entreprises du secteur privé et justifié son intérêt pour analyser le vécu de cadres des fonctions publiques, nous présenterons les principaux résultats et les questions qu’elle permet de soulever.

L’ouverture des organisations expose les cadres à des mandats confus

Les cadres savent depuis longtemps que leur métier consiste à faire faire et qu’ils sont soumis au jugement d’autrui. Par construction, le cadre est inscrit dans une chaîne de mandats : il reçoit un mandat de la part de son supérieur hiérarchique et confie un ou des mandats à un ou plusieurs subordonnés. La théorie de l’agence voudrait que les mandats clairs soient la règle et les mandats confus l’exception. Mais dans toutes les organisations, il y a de bonnes raisons pour que les mandats soient plus confus que clairs : les préférences des dirigeants peuvent être mouvantes, ambigües, contradictoires, il peut y avoir des intentions cachées, des mandants multiples…

La confusion est accrue par les jugements auxquels sont soumis les managers. Ces jugements sont basés autant sur des indices que sur des résultats. Il s’agit moins de mesurer les réalisations par rapport à des standards que de se prémunir par rapport à des préoccupations, des émotions ou des agendas issus des feux de l’actualité.

La confusion des mandats est source d’une charge mentale importante pour le manager, qui est conduit à multipli