Tout d’abord, écartons les discours mystificateurs sur la prétendue singularité technologique1, clairement analysés par Jean-Gabriel Ganascia2. Ils reposent sur une vision erronée de notre intelligence et des capacités d’une machine. Ils nous annoncent pour bientôt des machines pensantes et plus intelligentes que l’homme, nous menacent d’une prise de pouvoir des robots tout en nous promettant l’immortalité.

Les machines ne pensent pas

L’expression « intelligence artificielle » (IA) abuse du mot « intelligence ». Elle recouvre un ensemble de techniques capables de résoudre des problèmes que nous traitons, nous humains, en usant de nos capacités de mémorisation, de raisonnement, de création. Mais les machines ne pensent pas et n’ont pas de conscience. L’IA exploite essentiellement l’explosion des capacités de calcul, de mémorisation pour traiter de façon statistique des masses de données et en tirer des conclusions souvent exploitables.

Ces machines sont maintenant apprenantes, adjectif anthropomorphique, lui aussi trompeur, qui signifie qu’elles deviennent plus efficaces au fur et à mesure qu’elles moulinent de nouvelles données. C’est ce que l’on appelle le deep learning. Ainsi l’IA a-telle fait de très grands progrès dans la reconnaissance de la parole, non pas en s’appuyant sur les connaissances explicatives de la linguistique mais en exploitant mécaniquement les statistiques et en établissant des corrélations. De même, des diagnostics médicaux de plus en plus justes sont obtenus, mais sans que la machine soit capable d’expliquer les causes de ce qu’elle signale. Elle fait là aussi des corrélations, pas des raisonnements. Or, « corrélation n’est pas raison » beaucoup l’oublient ou font semblant de l’ignorer. Aussi, Jean-Gabriel Ganas