Le quinzième congrès de l’union confédérale des ingénieurs et cadres CFDT s’est tenu les 14, 15 et 16 juin 2017 à Saint-Malo, la cité corsaire célèbre aux temps des pirates.

Le corsaire, de l’italien corsa ou « course », c’est le capitaine. Celui qui est autorisé, par une lettre de marque royale, à attaquer tout navire battant pavillon d’Etat. Il mène des « guerres de course » notamment entre la France, l’Angleterre et la Hollande pour en épuiser les ressources économiques.

Les corsaires ne doivent pas être confondus avec les pirates puisqu’ils exercent leur activité selon les lois d’une farouche concurrence, donc, et avec l’autorisation de leur gouvernement.

Le mot « pirate » vient en effet lui du latin pirata qui signifie « celui qui tente la fortune, qui est entreprenant ». Un brigand, un autoentrepreneur, libre, qui « s’efforce de tenter sa chance à l’aventure » selon le Dictionnaire historique de la langue française1. Le pirate n’est pas soumis à l’autorité d’un état-major.

A l’âge de la culture maker2, les salariés pirates cherchent des nouveaux modes de coopération et des marges d’autonomie. Ils inventent des façons de travailler. « Les pirates d’un genre nouveau ne veulent pas quitter leurs entreprises mais au contraire la pousser de l’intérieur à se transformer et à travailler en réseau avec ces nouvelles entreprises souvent tournées vers le numérique qui redéfinit la chaîne de valeurs et donne le pouvoir aux utilisateurs » lit-on dans Le Monde économie3.

En tant qu’organisation syndicale, nous sommes bousculés par les nouvelles façons de travailler qui questionnent nos radars traditionnels. Mais nous sommes à l’écoute des formes d’emploi et des pratiques de travail émergentes.

La confusion entre pirates et corsaires résulte de plusieurs faits : jusqu’à la fin du Moyen-âge, les termes de « corsaire » et « pirate », synonymes, étaient employés indifféremment. Pour les distinguer, il faut qu’un État souverain délivre une lettre de marque. Une sorte de délégation. Or l’État souverain n’apparaît en Europe que plus tard à l’époque de l’économie moderne.

Les cadres sont-ils des loyaux corsaires ou des innovants pirates ? Hier « entre le marteau et l’enclume », aujourd’hui à la fois corsaires salariés et pirates übérisés.

De nos jours, le statut ne suffit plus à les distinguer. Obéir, transmettre, superviser, donner du sens, innover, favoriser les coopérations, donner l’alerte, motiver… : autant de multiples rôles, fonctions et responsabilités qui penchent autant du côté de la Marine royale que de Jack Sparrow. Que de dilemmes professionnels...

Embarquons dans la nouvelle mandature : ce numéro vous propose une lecture des enjeux de la CFDT Cadres à la recherche de nouveaux appuis professionnels débattus lors du congrès et une présentation de celles et ceux qui les animent.

1 : Alain Rey, 2010.

2 : Cf. Michel Lallement, L’Age du faire. Hacking, travail, anarchie, Le Seuil, 2015.

3 : Annie Khan, « Pirater le navire... pour sauver l’équipage », 8 mai 2015.