Tout le monde parle de sortir d’une crise dont les subprimes sont accusés d’être l’origine. C’est oublier que la crise a commencé plus tôt. Les problèmes économiques et sociaux de la montée du chômage, de la répartition inique des revenus ne datent pas de l’été 2008. L’histoire est celle d’un système né au lendemain de l’implosion des économies dirigées d’Europe centrale et orientale, marquée par la domination d’un consensus et par une instabilité permanente de la vie économique et sociale.

Trois grands systèmes de penser la vie économique se côtoient. Le système libéral semble aujourd’hui avoir fait long feu. Le modèle keynésien, vilipendé ces dernières décennies, montre aujourd’hui les signes d’une vigoureuse renaissance. Quant au modèle rhénan, inspiré de la Soziale Marktwirtschaft, il a survécu dans une discrétion quasi clandestine, faisant allégeance du bout des lèvres au premier modèle, tout en ménageant sa vitalité originelle. On prétend ici qu’il existe entre les deux derniers modèles des complémentarités possibles.

La base abstraite du consensus libéral

C’est le modèle dominant et archétypal, qui repose pourtant sur des axiomes irréalistes et irrecevables. Le premier axiome dit que les marchés ont toujours raison. Le deuxième affirme que les agents économiques possèdent toute l’information nécessaire à une prise de décision. Le dernier pose que la monnaie (et la finance?) sont neutres. En conséquence, tout obstacle au fonctionnement fluide des marchés est regrettable: pression fiscale, protection sociale, services publics notamment. Lorsqu’une crise se manifeste, la tentation d’une intervention sociale ne peut que retarder le retour à la normale.

Cet échafaudage de postulats laisse apparaître des failles. Ainsi, en va-t-il du risque, qui a joué un rôle prééminent en 2008. L’existence du risque est incontestable, su