50 ans, 50 ans déjà… « Lors de la création de l’Union confédérale des cadres, en 1967, ses dirigeants choisissent de placer la principale ligne de démarcation de la société française au niveau de la propriété des moyens de production. Les cadres, au sein de cette bipartition (d’un côté les propriétaires, de l’autre les salariés), sont placés résolument du côté du salariat » relève le sociologue Tanguy Cornu dans ses travaux effectués à l’occasion du quarantième anniversaire de l’Union1. C’est donc au nom du salariat que les cadres sont rattachés au monde plus vaste des employés et des ouvriers. Comment effectivement définir ce groupe social ? Selon les critères retenus, il y a une multitude de réponses possibles. Les revenus ? Le niveau de pouvoir ? Le diplôme ? De quels revenus, de quels types de pouvoirs, de quels niveaux et domaines de connaissances ?... Ce choix de l’unité du salariat et une représentation plurielle du monde du travail se distingue d’autres points de vue syndicaux inspirant la divergence de classes et des catégorisations sociales.

Ce choix permet de questionner au sein du salariat la question de la figure du cadre : dès ses origines, l’UCC travaille les singularités professionnelles, écoute les situations de travail, détermine ses revendications à partir de l’activité et des mutations de la société. Elle n’impose pas une représentation d’une catégorie, elle dessine une figure du cadre à partir du travail. « Les cadres se découvrent progressivement comme des salariés à part entière. Pourtant, au regard de leurs spécificités, ils ne sont pas des salariés comme les autres » affirme l’UCC devenue CFDT Cadres en 2001. Ce choix s’explique par la volonté d’analyser précisément le « métier » ou les « fonctions » des cadres. Ces termes ne sont pas neutres : ils signifient qu’être cadre renvoie avant tout à certaines composantes du travail réel, plus qu’à un statut. C’est cela, le choix de la CFDT, de représenter les salariés bien au-delà du registre des doléances et de la souffrance au travail.

Partant de l’activité professionnelle, les cadres sont des salariés qui inventent, innovent, créent, gèrent, animent ou ont une connaissance, une expertise… C’est en tout cas les critères souvent retenus, dans les conditions du « passage cadre » dans les entreprises et les administrations. « Le dire à haute voix, ce n’est ni minorer la capacité inventive des autres salariés, ni nier la nécessité d’avancer vers une réconciliation des activités intellectuelles et manuelles, l’activité de conception et de gestion et celle de l’exécution. Mais c’est regarder avec lucidité ce que nous sommes, ce, que sont nos collègues, pour bâtir avec eux une action de transformation, en lien avec celle des autres salariés »2. Aujourd’hui certains cadres n’hésitent pas eux-mêmes à se dire « ouvriers de production intellectuelle ».

Il est toujours aussi difficile d’établir un portrait-type, preuve que l’abandon du syndicalisme catégoriel il y a 50 ans à la suite de la transformation de la CFTC en CFDT est un choix syndical cohérent au service des salariés. La figure du cadre est une figure au travail.

Les témoignages des anciens montrent que la CFDT Cadres a toujours été en phase avec son époque. Certains propos apparaissent toutefois datés car la figure du cadre qui a d’abord été celle de l’ingénieur puis du cadre manager côtoyant plus récemment celle du cadre expert était celle de « l’homme responsable du foyer ». Depuis l’égalité se profile et les femmes cadres sont de plus en plus nombreuses. Notre histoire se continue et un avenir se fabrique avec vous.

1 : « Qu’est-ce qu’un cadre ? », mai 2007.

2 : Pierre Vanlerenberghe, 1981.