Qu’il s’agisse des activités domestiques des femmes, des travailleurs sans statut comme les détenus ou des emplois à faible reconnaissance salariale et symbolique, la prise de conscience de leur forte contribution sociétale, notamment pendant la pandémie, n’a pas infléchi la tendance à leur occultation. Dès lors, comment expliquer que rendre visible l’invisible ne suffise pas ? La sémantique peut peut-être nous éclairer. En effet, nous pouvons relever que la négation des formes de travail concernées renvoie à une autre négation, celle des personnes qui se trouvent disqualifiées et déclassées. Ce mouvement, porteur d’exclusion, allant d’une forme de négation vers une autre, présente de fortes similitudes avec les phénomènes de discrimination, notamment dans ses éléments de langage[2]. En effet, des distinctions peuvent être faites dans les modes de négation, notamment entre la négation lexicale et la négation syntaxique qui correspondent à la différenciation de deux processus de pensée différents sur le monde[3]. Le premier est implicite, oppose des contraires, quand le second est explicite et énonce une contradiction tout en affirmant la coexistence de « subcontraires ». La négation de type lexicale ou de contradiction est une réfutation d’une affirmation posée comme fausse ou hors du réel, tel l’exemple suivant qui n’est pas aussi anachronique que l’on pourrait le penser : « l’activité à la maison n’est pas du travail » qui signifie également « si cette personne travaille, c’est qu’elle est au bureau ». Cette forme de négation pourrait laisser supposer que l’expérience de la confrontation aux faits ne peut que conduire à une évolution des mentalités. Or, ce n’est à l’évidence pas le cas. Le travail invisible le reste même sous les projecteurs des médias et l’on retrouve dans cette perduration le