Dans son introduction, Yves Chassard pose les termes du renversement de pensée auquel nous sommes invités au cours de cette conférence. Notre culture nous fait adhérer comme naturellement à une conception qui lie la coopération au progrès. La marche de l’histoire conduirait l’humanité et le monde du travail dans un même mouvement, de l’âge de la coordination à l’âge heureux de la coopération. Dans la première période, il était nécessaire de coordonner des êtres frustes attelés à la production en grandes séries d’objets matériels. Les sciences de l’organisation, le taylorisme et les ingénieurs et cadres de l’époque permettaient de penser, d’outiller et de mettre en œuvre les coordinations nécessaires. Puis, après une phase de transition pendant laquelle les travailleurs ont été invités à s’essayer au franchissement des cloisons et au dialogue avec les clients, vient la modernité. Enhardis par ces expériences de communications horizontales, les êtres humains, éduqués plus longtemps, accèdent à un stade supérieur de civilisation. Ils préfèrent aux objets physiques les productions de l’esprit ; au respect des hiérarchies et des règles, ils substituent le goût pour les réseaux et l’information numérisée et instantanée.

Dons et contre-dons

Une nouvelle marche est franchie. Grâce à notre nouvelle compétence, celle qui nous permet enfin de coopérer, nous devenons les travailleurs du savoir qui se jouent de la nouvelle complexité du monde et qu’aucune règle ne parvient jamais à encadrer. Certes la coordination ne disparaît pas. Les bonnes synthèses englobent les éléments du passé (la thèse et l’antithèse pour ceux qui auraient été distraits pendant les cours de philo...). Nous ne sommes pas à la fin de l’histoire. Quelques produits matériels, low cost ou high tech, sont là pour témoigner des stades précédents. Quelques individus résistent. Les pl