On constate, depuis une bonne dizaine d’années, que les centres de décisions se sont largement déplacés dans la sphère de l’économie. Non pas que les entreprises, principaux acteurs de cette sphère, n’aient jamais influencé les relations entre les personnes et les communautés et leurs décisions, mais leur impact est devenu tel que de nombreux acteurs se sont mis à interpeller directement les entreprises sans passer par la «case politique». Simple souci d’efficacité ou unique possibilité pour changer le cours des événements ? Sans doute les deux en fonction des circonstances. Ajoutons que l’ampleur prise par la mondialisation a incontestablement contribué au développement du phénomène. Les raisons en sont fort nombreuses : prise de conscience de situations vécues à l’autre bout du monde, incapacité des gouvernements à régler (pacifiquement) les problèmes extraterritoriaux - notamment en ce qui concerne le respect des droits sociaux fondamentaux - l’intervention sur les marchés nationaux de capitaux empreints de quelques exigences extra-financières…

Des entreprises montrées du doigt

Parmi les cas qui ont défrayé la chronique ces dernières années, on peut mettre en avant le fabricant d’articles de sport Nike dont les pratiques dans les pays en développement, et en particulier en Indonésie, ont fait l’objet des plus vives critiques. La conjonction de la ténacité d’un homme, Jeff Ballinger, du sursaut d’un peuple recherchant une vraie liberté syndicale, l’Indonésie, de l’autosatisfaction d’une marque championne lors des Jeux Olympiques de Barcelone, Nike, et du dynamisme de la Clean Clothes Campaign néerlandaise ont déclenché, en 1992, un grand mouvement européen au sein duquel syndicats et ONG ont appris à se connaître et à travailler ensemble. Un peu plus tard, en 1994, et là, le mouvement est parti des Etats-Unis pour atte