La crise financière de l’automne 2008 a-t-elle marqué une rupture dans le mode de gestion de votre entreprise ?

Marc Amiaud. Non, cette crise n’a pas marqué une rupture, mais une accentuation de la pression sur les cadres. Au fond, la crise a bon dos, elle est arrivée à point nommé pour que les entreprises mettent en place une nouvelle politique salariale.

Lorsqu’on veut réduire les coûts dans une entreprise comme la nôtre, la masse salariale est la principale variable d’ajustement. Economiquement parlant, comme il n’était plus possible d’assurer une profitabilité de 15% sur les capitaux, taux qui était assuré avant l’automne par la bulle spéculative, il ne restait comme possibilité qu’une politique outrancière de réduction des coûts pour maintenir les profits.

Concrètement, la réduction de la masse salariale s’est réalisée par des délocalisations d’emplois vers des pays de l’est de l’Europe (Roumanie, Pologne, Tchéquie, Hongrie). Mais depuis que ces pays sont entrés dans l’Union Européenne, les coûts de la main d’œuvre ont augmenté et les emplois sont maintenant délocalisés vers l’Inde. La réduction de la masse salariale s’effectue aussi par des plans sociaux réguliers : tous les trois ans, 10% des postes sont supprimés chez Hewlett-Packard.

Yves Montagnon. Chez France Telecom-Orange, cette crise, comme ailleurs, a mis en difficulté l’actionnariat.

Pour maintenir les dividendes et fidéliser les actionnaires, de nombreux investissements ont été décalés, et la masse salariale a été réduite. Chaque micro performance a été vérifiée, la centralisation est devenue excessive, et les cadres ont été culpabilisés. Le sens de la finalité du travail et de l’entreprise s’est perdu – c’est d’ailleurs sans doute une des choses les plus graves – au profit d’indicat