Adhérent depuis 1971 en créant la CFDT à l’Institut français de gestion (IFG) à Paris, Yves a rejoint l’UCC pour travailler dans les domaines liés au développement des nouvelles technologies et aux interventions syndicales les concernant. Ce fut ainsi qu’il devint permanent syndical et fut élu en 1975 membre de la Commission exécutive de l’UCC, poste qu’il occupa jusqu’en 1984. Il fut chargé des nouvelles technologies, de l’emploi, de la formation et des retraites et il prit part à toutes les grandes négociations nationales interprofessionnelles, et développa en tant que membre du conseil d’administration de l’Association pour l’emploi des cadres (1978-1985) la fonction « études » de l’Apec, rendues nécessaires par la croissance importante du chômage des cadres, phénomène alors nouveau et inattendu.
Yves fut également membre du conseil d’administration du Centre d’études supérieures industrielles CESI (1980-1986) dont il assura la présidence de 1981 à 1982, puis de 1984 à 1985. Sous sa présidence furent lancées les formations de cadres en apprentissage et en particulier les premières formations d’ingénieurs en alternance. Yves a été également membre du Conseil économique et social (1979-1984) au titre de l’UCC-CFDT.
Nous avons tous bénéficié de ses travaux sur les changements technologiques – les « inforoutes » les appelait-il – et de son exigence que les militants s’emparent de ce champ de réflexion et d’action. Il avait le souci de la lucidité critique et positive. Si la CFDT Cadres a su rester en pointe en matière de technologies de l’information, de gestion du temps et de déconnexion, c’est à Yves que nous le devons. En 1993 il devint directeur du Centre d’études et de formation CREFAC et où il développa les formations liées aux changements technologiques.
Dans son sillage, les travaux de la CFDT auprès des cadres à l’époque de l’aménagement et la réduction du temps de travail ont été innovants Dans les années 1995-1998 et suite à une enquête sur les temps et les lieux de travail, nous avons proposé des formations pour comprendre, mesurer, voire maîtriser sa charge de travail (2004). Elles insistent sur une analyse mêlant « la manière de travailler », « la répartition du temps » et le niveau de charge ressentie qu’Yves nommait « ergostressie ».
Nous gardons le souvenir d’un camarade exigeant et chaleureux, marquant par sa curiosité et sa détermination une capacité à instruire des dossiers au long cours, avec réalisme et conviction.

 

Laurent Mahieu

 

Vivre à plusieurs une aventure comme celle des ingénieurs et cadres dans la CFDT à une époque où, tout à la fois, s’installait une crise économique durable générant un fort taux de chômage, et étaient fortement contestés les rapports hiérarchiques, ont tissé des liens indélébiles. Yves a été dès le congrès de l’UCC en 1975 - et ce jusqu’à notre départ commun en fin 1984 au congrès de Strasbourg - mon compagnon de route pour forger ce qu’est devenu l’UCC-CFDT. La CFDT Cadres comme la confédération CFDT (il participait en notre nom aux grandes négociations interprofessionnelles) lui doivent beaucoup. Sa force de travail, la clarté de ses propos de pédagogue, son humilité, marié avec un humour permettant de dépasser les sources de conflits, nous auront profondément marqués ! Sa grande capacité de travail ! Nous étions toujours étonnés, la petite équipe que nous formions, Philippe Brocard, Joseph Le Dren, Pierre Houdenot, Michel Rousselot, Julie Taverny, Sophie Jan, de le voir arriver Square Montholon le matin, avec des papiers tout prêts qu’il venait de rédiger au petit matin chez lui et sur lesquels nous allions collectivement plancher !La clarté de ses propos ! En 7 ou 20 points, en bon ingénieur ECAM qu’il était, mais surtout en magnifique pédagogue qui exerçait à l’IFG (Institut Français de Gestion) quand Roger Faist l’a embauché en 1974 - avant d’y revenir plus tard et de diriger plus tard le CREFAC -, il nous aidait à mettre de l’ordre dans notre propos collectif ! Et avec le sens des formules choc ! Pensons au fameux « De la civilisation de la peine à la civilisation de la panne » ! Son humilité ! Nombre de dossiers portés par l’UCC alors devaient beaucoup aux efforts d’approfondissement qu’il menait. Des rémunérations à l’emploi en passant par certains aspects de la protection sociale ! Son apport sera déterminant dans ce que fut le principal axe stratégique de cette époque, la Campagne sur les Nouvelles Technologies, numériques notamment. Nous y cherchions à redonner aux ingénieurs et cadres une capacité d’innovation sociale au cœur même des bouleversements que nous intuitions, susceptible de réhabiliter leurs fonctions aux yeux des autres catégories de salariés ! Ce qui devait permettre, au-delà de l’acquisition d’un langage commun, de bâtir une action de transformation commune de l’entreprise !
Son humour enfin ! Qui nous aidait à dépasser les petites tensions qui pouvaient apparaître, comme dans toute œuvre collective, entre des responsables aux parcours très divers ! Comme nous l’a dit Pierre Vial, Yves était un imaginatif et un visionnaire ! Nos liens sont là, écrits, dans ce qui a été une de nos sources d’échanges, la revue Cadres CFDT.

 

Pierre Vanlerenberghe