« Changer le travail, c’est commencer à changer la société » : partant de cette prémisse, le secrétaire général de la CFDT nous livre une vision résolument élargie du syndicalisme. En une soixantaine de courts chapitres (synthèses d’une série d’entretiens avec le journaliste Claude Sérillon) nous est démontré avec force pourquoi l’acte d’adhésion est un acte éminemment politique (au sens premier, étymologique, du terme). Nécessaire. Salutaire. Faire le choix de la fraternité, « passer du je au nous », retrouver intacte sa capacité d’indignation à l’encontre des injustices « face à un modèle de développement qui épuise les travailleurs et la planète », telles sont les valeurs que Laurent Berger met en avant pour construire « des hommes et des femmes debout ».
Mais l’indignation, la révolte ne mèneront qu’à l’impuissance ou à la violence si elles font l’économie de l’analyse. Comment transformer une réalité si l’on n’en saisit pas la complexité ? Comment changer la société si l’on ne pense pas « le travailleur dans sa globalité comme un citoyen qui consomme, qui se déplace, qui se loge » ? C’est cette adhésion au principe de réalité qui doit aussi nous pousser à investir l’ensemble de la société civile et des lieux où se forge l’intérêt général. Des relations quotidiennes du travail aux vertus de l’utopie, des services pour les adhérents à la nécessité d’une « Europe plus juste socialement » sont assemblées les pièces d’un puzzle qui précise les contours du « syndicalisme complet »
que voulait Edmond Maire. Un syndicalisme « plus mobile, plus agile »,
conscient qu’il faut faire « du spectaculaire pour être entendu ». Un syndicalisme surtout capable de dépasser la logique individualiste pour construire patiemment, obstinément un « pacte de bienveillance, du bien commun, pacte pour l’humain et pour l’humanité. Un pacte du pouvoir de vivre, aujourd’hui et demain ». Gageons que le nouveau président de la Confédération européenne des syndicats (CES) aura à cœur de le mettre en œuvre.