Pour Guy Aznar les causes du chômage peuvent se rassembler en trois familles :

Les causes classiques avec le chômage frictionnel résultant de la mobilité des salariés, le chômage conjoncturel lié aux conditions économiques (croissance-récession) et le chômage structurel dû à un coût du travail décourageant l’embauche (concurrence de la machine et des bas salaires du Tiers Monde). Ces différentes causes coexistent en ce moment avec pour résultat une offre de travail qui baisse. De plus, en France, des causes démographiques viennent gonfler la demande : nous ressentirons les effets du baby-boom jusqu’en 2005-2010 et le taux d’activité féminin continuera d’aller croissant, tout cela entraînant une augmentation des actifs de 1,2 million au minimum au cours des années quatre-vingt-dix.

La seconde famille regroupe les processus d’innovation technologique et la transformation des organisations. Dans ce cas, le choc à court terme introduit toujours une baisse de l’emploi. A long terme de nouveaux métiers sont créés et le système retrouve un nouveau sentier d’équilibre mais à un niveau inférieur.

Enfin la mondialisation provoque des modifications dans les coûts relatifs du travail et du capital.

Face à cela, Guy Aznar voit trois voies de solution à la crise :

D’abord augmenter le volume de l’emploi, c’est-à-dire favoriser la croissance économique. Cette méthode a ses limites car on peut désormais créer des richesses avec moins de travail. « La croissance nécessaire pour réduire significativement le taux de chômage à l’horizon 2000 apparaît dans le présent climat international du domaine de l’utopie : plus de 5 % par an en moyenne... ».

Seconde piste possible : redistribuer l’emploi par une réduction collective du temps de travail mais cela implique de la part des salariés l’acceptation d’une non-progression ou d’une moindre progression de leur pouvoir d’achat. L’autre possibilité passe par des solutions individuelles : c’est le temps choisi, le temps partiel, en ce domaine la France est en retard par rapport aux pays du Nord de l’Europe. Mais pour qu’une telle solution réussisse il faut assurer une redistribution des revenus. La question est centrale et conditionne tout l’avenir de la redistribution du travail. Pour cela Guy Aznar propose de mettre en place une innovation intéressante : le deuxième chèque ou indemnité de partage du travail. Le revenu aurait deux composantes, l’une directement liée au travail, l’autre correspondant à une redistribution, assurée par la collectivité, des gains de productivité. Ce deuxième chèque n’est jamais versé à une personne qui ne travaille pas ni à une personne qui travaille à plein temps aux normes en cours. En cela il se distingue du revenu minimum d’existence préconisé par d’autres économistes et que Guy Aznar critique (rejoignant là la position de la CFDT). On peut trouver l’argent pour financer une telle mesure puisque nous payons trois millions de personnes inactives et nous dépensons plusieurs centaines de milliards par an pour financer la redistribution du travail.

Enfin créer des emplois dans un nouveau secteur d’activités, le troisième secteur (les deux autres étant le public et le privé) où la logique serait non pas la création de profit mais la création d’emplois à partir, d’une part de la demande d’emplois et d’autre part des besoins actuellement non ou mal satisfaits, généralement au plan local. On ferait appel à un financement multiforme : transfert de dépenses passives de l’emploi en dépenses actives, appel à l’impôt, appel au mécénat, facturation des prestations.

Contrairement à la thèse avancée par Dominique Méda, Guy Aznar ne pense pas que le travail soit une valeur en voie de disparition mais qu'il va être réinventé. « Le travail permet à l’homme de se relier au monde et de se relier aux autres, en instituant un mécanisme d’échange économique, affectif et social, alors que l’impossibilité d’accéder au travail constitue une forme de bannissement de la société, de bannissement du monde ».

Là aussi, il rejoint les thèses de la CFDT.

Peut-être aurions-nous intérêt à nous appuyer sur ses réflexions pour faire avancer la réduction du temps de travail ?