En devenant président il y a six mois, Lula franchissait la dernière étape d’une longue marche commencée plus de vingt ans auparavant. Un immense espoir de changement animait la foule immense de ses partisans avec l’allégresse de ceux qui parviennent au bord de la terre promise. Il confirmait la validité de la voie choisie par Lula et ses compagnons quand, secouant la dictature finissante, ils avaient parié sur le mouvement social pour jeter les bases d’un nouveau projet politique. Leur ambition : faire de la politique autrement pour démocratiser en profondeur une société brésilienne marquée par l’autoritarisme des élites traditionnelles. Leurs valeurs – justice sociale, éthique politique, transparence et participation populaire – façonnent leur identité aujourd’hui.

Dans la foulée des grèves de la fin des années 70, ils avaient en quelques années lancé le Parti des travailleurs (PT), porté l’exigence d’un nouveau syndicalisme incarné dans la CUT, tandis que ses militants ruraux s’investissaient dans le mouvement des sans terre (MST) redonnant espoir aux paysans déracinés. Aujourd’hui Lula est président et son parti dirige Sao Paulo, la capitale économique du pays. La CUT s’est imposée de loin comme la première centrale syndicale et le MST représente une force de pression incontournable pour la redistribution des terres et la réforme agraire.

Mais comme l’a affirmé le nouveau chef de l’Etat, s’il entendait changer le Brésil, lui-même avait changé au contact des réalités de son pays. Sa stratégie de réformes structurelles négociées vise par la redistribution et la modernisation à plus de justice dans un pays où plus de 40% de la population vit au-dessous du seuil de pauvreté. Ce n’est pas le message de la révolution qui « enferme dans le ghetto » mais d’une réforme radicale au sens premier du terme, c’est-à-dire qui « s’attaque à la racine des