La réponse n’est pas simple et il semble qu’on pourrait avancer de nombreuses raisons qui ont contribué à maintenir le contrat de travail et mieux encore à le promouvoir comme un instrument juridique, une véritable source de droit. Revenons sur ces raisons.

D’abord ce contrat de travail est demeuré le critère du salariat. Comment déterminer si tel individu qui travaille pour autrui en apparence comme artisan, ou comme locataire, ou comme mandataire, est en fait un salarié ? Il faut rechercher, et uniquement rechercher, si cet individu travaille dans une relation de subordination, si son contractant peut lui donner des ordres et instructions, s’il peut surveiller et contrôler son travail, s’il peut même le sanctionner, par exemple en mettant fin au travail. C’est par cette recherche que des chauffeurs de taxi qui, officiellement, étaient des locataires de leur voiture et qui, loin de recevoir un salaire, payaient un loyer journalier, ont pu être requalifiés en chauffeurs salariés1. Le critère du contrat de travail s’est ainsi révélé commode pour réintégrer dans le giron du droit du travail, et donc de la protection sociale, des travailleurs qui avaient été contraints pour obtenir un emploi d’accepter un statut de travailleurs indépendants. Il a permis, aussi, et à l’inverse d’éliminer des individus qui, sans être de véritables travailleurs subordonnés, cherchaient abusivement à profiter de la protection des lois sociales.

Ensuite les juristes se sont aperçus que la technique contractuelle n’était pas nécessairement hostile aux salariés. Cette évolution n’est pas propre au droit du travail ; dans de nombreux domaines, celui de la consommation par exemple, mais aussi celui de la vente d’immeubles ou de la location d’habitations ou de terres, le cadre contractuel s’est fait protecteur. Il a suffit, souvent, de proscrire des pratiques abusives pour reven