Même si elle est désormais régulièrement évoquée avec une floraison de chartes affichées par les organisations sur leur site, l’éthique n’est pas un phénomène de mode. Définie comme l’art d’orienter sa conduite, elle est et a toujours été au cœur de l’exercice des responsabilités. Ainsi, supposer l’existence de pratiques de gestion, qui pourraient s’exonérer des préoccupations éthiques, relève de l’absurde, ne serait-ce que parce que l’objectif de tous les professionnels est de « bien faire » et de mettre en œuvre les « bonnes pratiques ». Quoi qu’en pensent les plus pessimistes ou les plus cyniques, l’immoralité en matière de gouvernance n’est pas tenable. Elle l’est aujourd’hui d’autant moins qu’elle compromet l’image des organisations et s’accompagne désormais de contre-performances financières. L’éthique, que nous considérerons, en référence au philosophe Paul Ricœur, comme un processus de questionnement des normes de la morale, n’en est pas pour autant garantie. Elle suppose la capacité d’adopter une attitude critique telle que définie par Kant puis, plus récemment, par Foucault, et qui consiste à s’appuyer sur son propre entendement pour guider ses actions afin de se prémunir de tout assujettissement aux mécanismes du pouvoir en interrogeant les discours de vérité. Ainsi, les injonctions de loyauté à l’entreprise ou à la direction que subissent les cadres, plus ou moins implicitement, peuvent-elles, paradoxalement, entraver, voire empêcher leur positionnement dans une posture éthique. Elles peuvent bloquer toute remise en question, quand « ce qui est bien ou ce qui est mal » demande, au contraire, pour ne pas se figer dans l’instauration d’un ordre moral totalisateur, un travail réflexif permanent. La loyauté, en ce qu’elle exige de s’aveugler et de nier sa propre pensée, est ainsi, en soi, génératrice de dilemmes éthiques. Ces situations où des valeurs ou des principes entrent en opposition sont une source de mal-être, su