Malgré l'allusion littéraire à laquelle le titre fait référence, c'est un ouvrage très technique et très pratique sur l'aménagement et la réduction du temps de travail qu'on nous propose là.

En préambule, les différentes notions de productivité sont précisées, ce qui permet à nos auteurs une critique sévère de la politique actuelle des entreprises : « Les décisions en matière de réduction d'effectifs découlent d'une attention excessive portée aux seuls indicateurs de productivité apparente du travail. Deux constats méritent à cet égard d'être soulignés. D'une part, la multiplication des plans sociaux correspond à un effet de mimétisme interentreprises sur ce seul critère de productivité main-d'œuvre : des « normes » de productivité, vécues comme universellement valables, se diffusent ainsi au-delà de toute analyse des contraintes spécifiques qui pèsent sur chaque entreprise. D'autre part, la détermination des sureffectifs découle directement et exclusivement de cette mesure de la productivité main-d'œuvre ».

Faisant référence à des études socio-économiques extrêmement rigoureuses les auteurs concluent à la nécessité absolue de réduire le temps de travail comme moyen de compenser « l'excès » de progrès de productivité par rapport à la croissance.

Mais les modèles socio-économiques nous indiquent que les « effets emploi » ne sont significatifs que si trois conditions sont réunies : la réduction est forte et rapide afin d'empêcher un rattrapage par ce surplus de productivité du travail ; la réduction permet une augmentation de la durée d'utilisation des installations ; il n'y a pas compensation salariale intégrale.

Il existe trois façons de réduire la durée du travail : la réduction généralisée, qui doit procéder d'une action législative ; la réduction individualisée avec l'introduction de la notion de temps choisi (temps partiel non imposé) ; enfin la réduction contextualisée, c'est-à-dire liée au contexte de la branche professionnelle, du secteur ou, le plus souvent, de l'entreprise elle-même.

Dans des contextes spécifiques de marché, de concurrence, de croissance, etc, « Il ne s'agit donc plus d'imposer une réduction uniforme ni de susciter la demande individuelle et unilatérale de temps partiel, mais d'inscrire l'ensemble des « possibles » en matière de réduction du temps de travail (individuelle ou collective) dans le cadre d'une démarche socio-économique globale au sein de l'entreprise, autour d'une problématique du « temps convenu » - sous-entendu : convenu entre les salariés et l'entreprise ».

Ce temps convenu se situe à l'articulation entre les enjeux réels de l'entreprise, identifiés et analysés à partir de son contexte, et les aspirations individuelles et/ou collectives des salariés.

Après avoir examiné les conditions réalistes d'une réduction du temps de travail, on nous présente la démarche et les outils nécessaires pour entreprendre une action visant à maîtriser la réorganisation du temps de travail, le tout accompagné de fiches techniques, de grilles d'analyse ou d'évaluation : schématique, cette démarche se découpe suivant quatre thèmes : l'analyse, la négociation, la mise en œuvre et l'évaluation.

En conclusion, un ouvrage extrêmement rigoureux rédigé par deux consultants spécialistes des problèmes de l'emploi, absolument indispensable aussi bien pour les DRH que pour les militants syndicaux engagés dans des négociations sur l'ARTT.