Nicolas Dubost est un ancien ouvrier de Renault, ex-cédétiste et aujourd’hui patron d’une entreprise de formation des élus de comité d’entreprise. Il relate son expérience de rencontre avec les élus et les directions de ces entreprises lors des formations qu’il donne dans les locaux de l’entreprise. Le livre est bien documenté d’une part sur les enjeux des comités d’entreprises et d’autre part sur l’état des lieux et des chiffres. Il y a dans l’hexagone, 30 000 comités d’entreprise avec une moyenne de 5 titulaires et 5 suppléants et donc environ 230 000 élus de CE. Parmi les 30 000 comités, 10 % concernent les entreprises de moins de 50 salariés, 31 % entre 50 et 99 salariés, 30 % entre 100 et 199, 19 % entre 200 et 499, 6 % entre 500 et 999 et 4 %, 1000 salariés. Plus de 71 % des CE sont ainsi dans des entreprises de moins de 200 salariés, dont moins de la moitié ont un délégué syndical.

50 à 60 % de l’ensemble des représentants ne sont pas élus sur des listes syndicales qui bénéficient pourtant du monopole de présentation au premier tour.

Et l’auteur de s’interroger sur le désert syndical mais surtout sur la « mauvaisitude » des syndicats, retranchés dans leurs bastions des grandes entreprises souvent donneuses d’ordre ou du service public, dont les dirigeants qui en sont issus ne peuvent pas comprendre les problèmes des PME. La critique est acerbe et donne la parole aux élus rencontrés : « on ne veut pas que notre action dans l’entreprise soit décidée par un permanent extérieur qui ne connaît pas notre réalité » ou « on trouve que les syndicats sont trop politisés, avec eux, il faut toujours être contre le patron » et encore « le comportement de certains délégués du personnel, davantage soucieux de leur protection personnelle que de l’intérêt général »

Concernant la faiblesse syndicale, l’auteur dit défendre l’organisation syndicale telle que construite en 1968, avec la désignation d’un délégué syndical dans l’entreprise par une structure extérieure et donc garante d’une indépendance à l’égard des directions. Il conteste néanmoins sa légitimité contre celle des élus par « le peuple des entreprises ».

L’auteur explore aussi la loi du 4 mai 2004 et le rapport Haddas-Lebel, mais il oublie la loi de la cohésion sociale qui instaure l’obligation de négocier une GPEC et le rapport Chertier qui propose de nouvelles articulations entre la loi et la négociation collective. On ne sait plus très bien ce que défend l’auteur, son marché de la formation qui repose essentiellement sur les non-syndiqués ou une quête démocratique des petits élus sans-étiquette contre les grosses centrales à côté de la réalité ? Le combat de Nicolas Dubost vise à promouvoir le « poor lonesome Lucky Luke » dans le rôle de l’élu et romance son rôle de justicier social envers tous.

Si l’on doit admettre la faiblesse syndicale, en nombre d’adhérents, dans les PME, pour le suivi des élus et des désignés et une évolution nécessaire des règles de la représentativité et du dialogue social, la solution n’est pas dans l’opposition entre les élus et les désignés.

L’équilibre est fragile, mais l’articulation des instances par un syndicat libre, démocratique et indépendant et l’adhésion des élus sont les seuls remparts efficaces contre les arbitraires patronaux ou gouvernementaux.