Cet ouvrage est une traduction de « The new economics for industry, government, education, écrit par William Edwards Deming, consultant américain qui a enseigné le management de la qualité aux Etats-Unis et surtout au Japon, enseignement basé sur la prise en compte des lois statistiques.

Le livre est écrit à l’américaine, c’est-à-dire d’une façon plus proche de la transcription de conférences que de l’ouvrage fortement structuré.

Un message important : en matière de qualité, il importe de bien distinguer ce qui est fluctuations aléatoires à l’intérieur d’un système stable (causes communes) et causes spéciales. Les actions à entreprendre ne sont pas du tout les mêmes dans les deux cas et la confusion entre les deux types de causes conduit à des coûts importants, que l’on cherche à prendre des précautions à tout prix contre des causes imprévisibles ou que l’on se résigne à des écarts qui pourraient être réduits significativement par une action d’ensemble. Car un autre message fort de Deming est que la qualité comme la sécurité sont essentiellement de la responsabilité du management et qu’il est vain de chercher à motiver les acteurs à propos de résultats sur lesquels ils n’ont pas prise. Une expérience utilisée pendant les stages de formation à la méthode Deming est celle des billes rouges : une caisse contenant quatre-vingt pour cent de billes blanches et vingt pour cent de billes rouges représente la matière première, différents ouvriers équipés d’une palette à cinquante alvéoles doivent la remplir en la plongeant d’une certaine manière dans la caisse, des contrôleurs comptent le nombre de billes de chaque couleur, et en fin de journée le contremaître distribue récompenses et punitions aux ouvriers qui ont respectivement obtenu le plus petit et le plus grand nombre de billes rouges. Il est évident que le fait de licencier en fin de semaine les ouvriers qui ont obtenu les plus mauvais résultats n’a aucune influence sur la qualité de la semaine suivante, puisque les ouvriers ne font que suivre les méthodes et que la répartition du nombre de billes, aléatoire, n’a aucun rapport avec la bonne volonté des ouvriers (ce serait complètement différent si les ouvriers avaient pour consigne, par exemple, de rejeter les billes rouges et étaient jugés après cette action).

Deming est fortement opposé au système de concurrence acharnée, considéré comme le seul qui vaille par bon nombre de gourous du management, et lui préfère celui de coopération. Il va jusqu’à proposer la suppression de tout classement « au mérite », aussi bien à l’école que dans l’entreprise. Pour lui, « Tout homme est né avec la motivation intrinsèque, l’amour-propre, la dignité, le désir de coopérer, la curiosité, le plaisir d’apprendre. Très développés au commencement de la vie, ces attributs sont progressivement écrasés par les forces de destruction ». Ces forces de destruction sont, pour Deming, « la distribution forcée de notes à l’école », puis « mesure du mérite, jugement et classement, concurrence entre personnes, groupes, division » et « salaire attractif, salaire pour une performance », « objectifs numériques sans méthode », « explication à toute variation », « sous-optimisation » , celle-ci étant particulièrement forte lorsque « chaque groupe, chaque division, est un centre de profit ».

On le voit, ces thèses ne sont pas tout à fait celles des tenants de la concurrence et la compétition à tout va et les oreilles des partisans du « client interne » peuvent siffler !