C’est vrai pour l’Europe du Nord où il faut surtout retenir l’existence en Grande-Bretagne, dans le secteur de l’énergie, de quelques grèves sans lendemains qui se sont déroulées en février dernier sur le thème de « l’emploi prioritaire pour les Britanniques ». Mais aussi en Europe du Sud beaucoup plus proche de la France sur le terrain des grandes mobilisations syndicales. En Espagne où la récession économique est très sévère et où le taux de chômage a doublé en dix-huit mois, seules quelques manifestations ont touché des villes comme Saragosse ou Barcelone en février et mars 2009 avec des participations bien inférieures – de 15 000 à 35 000 personnes – à celles connues en France. En Italie, la grève des fonctionnaires organisée par la CGIL le 18 mars fut un échec : 10% des salariés concernés. Et il a fallu attendre le 4 avril dernier pour que les rues de Rome s’emplissent de centaines de milliers de manifestants revendiquant de nouvelles mesures sociales face au plan anti-crise mis en œuvre par le gouvernement italien.

Dès lors, une question se pose. Pourquoi cette singularité française qui implique que la France soit souvent confrontée seule ou bien avant d’autres pays à des mouvements d’ampleur et notamment à des manifestations de rues massives, fréquentes et répétées ?

À l’évidence, cette question renvoie à un constat général bien connu. Contrairement à d’autres pays, le recours à l’action protestataire constitue souvent en France un préalable à la négociation. Les logiques de rapports de force immédiats l’emportent sur les démarches contractuelles. Dans ce contexte, un symbole fort existe, celui de la grève comme moyen de pression sur la négociation collective. La grève forme un dispositif symbolique fort non seulement parmi les militants mais aussi chez beaucoup de salariés. Et mettre en cause so