Dans la société française de 1870, le « sublime » était un travailleur émancipé qui, compte tenu de ses compétences d’ouvrier très qualifié, était devenu maître de sa mobilité. Il choisissait son patron, la durée de son engagement et entendait ensuite profiter de la vie et de ses loisirs. Ces ouvriers furent rapidement marginalisés par l’évolution de la société industrielle. La résistance ouvrière a pris d’autres voies plus orientées vers la solidarité collective. Le XXe siècle a vu le capitalisme dominer progressivement l’économie mondiale. Loin de répondre aux aspirations des hommes, il laisse un paysage dévasté : chômage persistant, montée de la précarité, inefficacité de la protection sociale. Dans ce pessimisme généralisé, Bernard Gazier ose croire à un nouveau projet de société qu’il nomme « social-démocrate renouvelé », centré sur la promotion des travailleurs et des activités utiles à la société, et sur la négociation collective. Il ne s’agit pas d’une fiction : il s’inspire de nombreux acquis obtenus entre autres dans les pays nordiques. Ces nouveaux modèles donnent aux personnes des marges de manœuvre dans leur vie professionnelle en instaurant des droits à la mobilité, à la formation et à la possibilité de choisir une vie professionnelle et privée équilibrée. Bernard Gazier nous propose ainsi de redécouvrir et généraliser la philosophie des « sublimes ».

Au fil des pages, il explicite différentes expériences européennes, en terme de politiques d’emploi notamment. Il les analyse en terme de transition, d’un métier à l’autre, d’un emploi à l’autre, d’un statut de salarié à celui de chômeur. Son analyse éclaire également d’un jour nouveau la question de l’égalité des hommes et des femmes dans le travail. Mieux gérer les temps sociaux, combattre l’exclusion par l’affirmation et la mise en application de nouveaux droits, inciter les responsables politiques à faire des choix en faveur de l’emploi « soutenable » tel est le credo de Bernard Gazier dans cet ouvrage.