Les outils numériques valsent entre supports à un travail de qualité, une rapidité d’exécution, et des causes de contraintes temporelles et relationnelles complexes. Ils génèrent « un rapport au temps inédit : si l’accélération des échanges accroît le sentiment et la demande d’autonomie, elle génère une dépendance liée au rythme qu’elle imprime ». Les chercheurs ont étudié le paradoxe de cette nouvelle servitude volontaire, entre affranchissement des frontières spatio-temporelles et rétrécissement de l’autonomie. Forte composante du travail de l’identité de travail, celle-ci apparaît sous son versant négatif.

L’enjeu de l’enquête menée auprès de 7 500 agents d’une collectivité territoriale l’usage des mails est plus ou moins surenchéri selon les organisations de travail, de mesurer l’impact de son déploiement sur l’activité. Pour en tirer trois dimensions. La première est la portée symbolique entre professionnels : il faut être disponible, à un flux d’information, à des interprétations de textes courts, à partager l’illusion d’un cadre organisationnel, jouant sur la peur infantile de manquer quelque chose, accroissant la charge cognitive liée aux messages en attente. Les usages de mails sont également des révélateurs amplifiant « les traits culturels de l’organisation » : hiérarchie, codes... Leur traitement est rapide mais « leur mémorisation renvoie à une logique bureautique ». En effet, la caractéristique majeure observée chez les cadres de cette collectivité repose sur « la lutte effrénée pour maîtriser le flux d’information et le contrôler dans des contextes d’une organisation dont le fonctionnement reste hiérarchique mais qui développe des projets transverses ». Le mail révèle des fonctionnements a priori centrés sur le partage et la circulation de l’information aux ressorts centralisés et segmentés.