Cet ouvrage retrace l'histoire des bassins industriels qui se sont développés autour de la houille et du fer en Grande-Bretagne d'abord puis se sont répandus dans toute l'Europe du Black Country anglais jusqu'au Donbas en Ukraine en passant par le Valenciennois, la Rhur et la Silésie et vers le Sud, le bassin de Saint Etienne et les Asturies.

Le texte est illustré de nombreuses cartes mais elles sont malheureusement pratiquement illisibles, ce qui est fâcheux pour ce genre d'ouvrage.

En introduction l'auteur nous signale que son étude a pour but d'évaluer les possibilités d'adaptation de la société aux mutations économiques.

Il définit le bassin industriel «... comme un territoire initialement construit pour assurer le rendement optimum de l'industrie lourde en tirant profit des ressources locales en matières premières et en main-d'œuvre et en concentrant géographiquement les innovations scientifico-technologiques majeures qui caractérisent la révolution industrielle».

Les bassins se sont constitués par accumulation des activités industrielles autour des gisements de matières premières. Cependant leur développement n'a pu se faire que grâce à la rencontre de quelques facteurs-clés comme : la mutation du système énergétique qui donne au charbon un rôle-clé dans l'économie, les innovations dans les industries du feu, les coûts prohibitifs des transports, une main-d'œuvre suffisante et qualifiée, des capitaux, un cadre étatique, des entrepreneurs.

L'aspect humain est présent tout au long de ces pages où l'on assiste au développement de communautés ouvrières aux conditions de vie difficiles, exploitées par le patronat. C'est le cas, notamment, de la Ruhr où Hitler supprime les syndicats, tout en se méfiant également des patrons. Dans ce bassin, la crise de 1929-33 aggrave encore les conditions de travail. Partout, le fossé entre les très pauvres et les très riches s'est creusé davantage, les femmes et les enfants sont exploités de façon outrancière dans les mines et les fabriques. Mais une vie sociale, une vie communautaire s'organisent où les bistrots, les fêtes et les bals jouent un rôle important pour la diffusion des idées syndicales.

Qu'en est-il aujourd'hui de la reconversion de ces bassins, dénommés « Régions de Traditions Industrielles » (RETI) dans le jargon communautaire ?

Suivant leur degré de diversification et suivant leur taille ils s'en tirent plus ou moins bien. Certains trop petits, trop spécialisés ont rapidement décliné sans trouver de voie de reconversion.

La logique qui était à la base des bassins industriels perd chaque jour de sa nécessité en raison de la primauté croissante des facteurs immatériels.

Les six RETI d'Europe accusent un taux de croissance macroéconomique inférieur à celui de l'Union européenne, sauf dans le cas de la Ruhr avec le Nordrhein-Westfälen. Ce land allemand avait mis sur pied, dès 1968, un important programme de conversion qui a porté ses fruits (travaux d'infrastructure, formation professionnelle et universitaire, etc.). Cette refonte territoriale contraste avec l'immobilisme du Nord/Pas-de-Calais. Le fédéralisme est ici l'agent primordial de la reconversion.

Ailleurs le redéploiement industriel, plus ou moins réussi selon les bassins se fait sur de nouvelles bases formées de PME à haute technologie avec intervention obligée des organismes régionaux, de l'Etat et de l'Union européenne.

Certes les bassins industriels sont en déclin mais ils constituent un patrimoine sur lequel s'appuie le progrès de la société moderne et l'auteur nous fait remarquer que la plupart des bassins industriels font partie de l'espace central ouest-européen qui va de Glasgow et du Nord-Ouest de l'Angleterre jusqu'à l'Italie centrale. Depuis le haut Moyen Age, cette Lotharingie a toujours été et reste la zone la plus prospère de l'Europe. Et les bassins industriels sont à l'origine de la Communauté européenne avec la CECA.