Ce livre présente une expérience de redressement d'une entreprise au moment où un événement international bouleverse son environnement et provoque un effondrement de son marché et de ses résultats.

Il est très vite évident qu'il ne s'agit pas seulement d'une « étude de cas » classique, même si elle a été souvent présentée dans des écoles de management mais, bien davantage, d'une aventure industrielle qui capte vite l'attention bien au-delà des avatars de l'application d'une formule, même décrite avec précision : SDM (pour Simplifier, Décentraliser, Manager).

C'est plutôt le récit de la tentative, finalement réussie, d'un vrai responsable qui, pour relever un défi difficile, s'est refusé aux solutions de facilité (par exemple restructurer et reconvertir en taillant dans les coûts de production, dans les établissements les moins rentables et dans les effectifs) mais a préféré « se sortir les tripes » (sic), pour trouver et mettre en œuvre d'autres solutions, quitte pour cela à courir des risques importants, y compris au niveau personnel.

Attachante donc d'abord par la personnalité hors norme de son promoteur et son charisme assez exceptionnel de meneur d'hommes, cette expérience l'est aussi sous l'angle des principes qui ont inspiré les méthodes utilisées : ils se réfèrent explicitement aux « principes d'action » du groupe concerné qui prône par exemple :

 

  • le respect et le souci du développement des personnes,
  • la recherche de produits et de services utiles aux hommes et adaptés aux besoins exprimés par les clients,
  • le souci de la sécurité des salariés de la protection de l'environnement, etc.

 

Cela peut paraître banal à ce niveau de généralité mais cela l'est moins quand cela se traduit dans des choix concrets face à une situation difficile qui aurait plutôt incité à en reporter l'application à des jours meilleurs.

Les intérêts de l'actionnaire ne sont pas oubliés (« droit à un rendement suffisant de leurs investissements ») mais ne sont pas « au centre » pour reprendre une expression devenue célèbre.

Autre dimension intéressante de l'expérience : la formidable opération de mobilisation des volontés et des énergies autour du projet, au moyen d'innombrables réunions de présentation, d'explication et d'évaluation organisées pour redonner au personnel (sept mille personnes) jusque là démoralisé et angoissé par la crise, espoir et confiance dans le succès du projet.

Quant à la relation avec les syndicats, elle n'a pas été négligée : ils ont été très vite mis au courant, consultés et rassurés sur la façon dont seraient pris en compte les aspects sociaux, notamment grâce à la création d'un groupe de travail spécifique et à la présence d'« observateurs sociaux » dans les autres ateliers de réflexion et de suivi. Affirmer à partir de là comme l'écrit l'auteur, que cela a fait des syndicats des « alliés objectifs » de l'opération ne manque pas, par contre, d'ambiguïté.

Cette belle réussite laisse cependant entières quelques interrogations sur les enseignements qu'on peut en tirer dans les écoles de management, notamment deux :

 

  • peut-on la présenter, dans ce cadre, comme un exemple de management intelligent et efficace, avec une belle « formule magique » à la clé (SDM), alors que la réussite semble avoir été surtout due au charisme exceptionnel et à la personnalité hors du commun de celui qui l'a menée ? Autrement dit, existe-t-il des recettes en management indépendantes des hommes qui ont à les mettre en œuvre, et qui la formalisent après coup ?
  • qu'elle a été l'implication réelle du salarié moyen dans cette aventure, au-delà des quelques centaines (c'est déjà beaucoup) directement touchés dans les opérations de communication et de mobilisation ? Peut-on, et comment faire autre chose, avec sept mille personnes, que les rassurer sur leur emploi, l'évolution des conditions de travail et l'avenir de l'entreprise ?

 

Bref, « Engagements, Espoirs, Rêves », c'est pour qui ? Ce beau titre, comment faire pour qu'il ait un sens pour tous ?