La seconde décennie d’eurocadres

EUROCADRES commence sa seconde décennie. Il y a dix ans en effet, le 24 février 1993, les délégués de 40 organisations venant de 15 pays créaient à Luxembourg le Conseil des cadres européens - EUROCADRES. A la fin de la même année, le traité de Maastricht conférait certaines prérogatives aux partenaires sociaux en obligeant la Commission européenne à les consulter et en leur permettant d’interrompre le processus législatif pour lui substituer une négociation collective européenne. Il fallait définir qui étaient ces partenaires sociaux : la liste en a été établie le 14 décembre 1993, avec naturellement EUROCADRES, dont les organisations membres rassemblaient alors quatre millions de cadres adhérents. Ce chiffre atteindra et dépassera les cinq millions en 1998.

C’est à Bruxelles, le 24 novembre 2003, que cet anniversaire a été fêté par les représentants des organisations membres, ainsi que par les invités des institutions et organisations européennes avec lesquelles nous travaillons. José Maria Gil Robles, ancien Président du Parlement européen et auteur d’un rapport sur les cadres adopté par le Parlement en juillet 1993, nous a fait l’amitié de se joindre à nous. Emilio Gabaglio, qui fut le Secrétaire Général de la CES (Confédération européenne des syndicats) de 1991 à 2003, dont le soutien nous a été très précieux, a rappelé l’importance qu’il attachait à l’action de notre organisation de cadres dans le mouvement syndical européen. Son successeur John Monks s’est inscrit dans la continuité en marquant sa volonté de voir EUROCADRES se développer au cours des prochaines années.

Les organisations membres d’EUROCADRES sont extrêmement diverses, par leur culture, leur taille, leurs modes de fonctionnement. Cette diversité s’accompagne de trois facteurs de convergence. Toutes nos organisations sont impliquées dans les processus de négociation collective (de multiples façons et à divers niveaux) et donc interviennent pour assurer dans les faits les meilleures conditions d’emploi dans des circonstances qui changent. Second facteur, les organisations membres d’EUROCADRES représentant des personnels hautement qualifiés, elles sont conscientes de représenter seulement une partie du monde du travail, mais elles ont toutes choisi de ne pas rester isolées, repliées sur des corporatismes de groupes, et de travailler avec les autres. C’est donc tout naturellellement qu’EUROCADRES est une organisation européenne associée à la CES, et coopère avec l’ensemble du mouvement syndical européen. Toutes enfin ont la volonté de soutenir la construction européenne. EUROCADRES y a inscrit son action depuis les discussions sur le traité de Maastricht, jusqu’à celles en cours sur la Constitution européenne. Cette constance n’a pas faibli.

EUROCADRES est intervenu depuis dix ans dans les débats et dans les processus de décision pour qu’un développement économique aille de pair avec le progrès social. Au nom des cadres européens, nous avons pris part au dialogue social et à la négociation collective européenne. Nous avons construit une organisation interactive et ouverte et appris à travailler en réseau. Enquêtes et études, échanges d’informations et d’expériences ont permis de formuler des propositions sur les principales questions intéressant les cadres.

Nous contribuons ainsi à explorer de nouvelles voies pour le syndicalisme en cherchant son renforcement et sa modernisation.

Nous le faisons en élargissant la base du syndicalisme aux catégories plus qualifiées jusqu’aux plus hauts niveaux de responsabilités. Les cadres constituent de 15 à 20 % de l’ensemble des salariés, et davantage dans certains secteurs. Cela ne peut être ignoré. Mais surtout nous nous appuyons sur la reconnaissance des identités professionnelles, et nous veillons à ce que la diversité des situations soit prise en compte, à ce que les différences soient respectées dans la construction de stratégies syndicales communes et diversifiées.

Nous contribuons à élargir les domaines traditionnels d’intervention, pour traiter de sujets clés pour l’avenir : emploi, conditions de mobilité, reconnaissance des qualifications et diplômes, éducation et formation, égalité des chances, conditions de travail et temps de travail, modèle européen de management.

Nous cherchons, avec nombre d’organisations membres, à inventer de nouvelles formes de travail syndical, et à établir de nouvelles articulations entre l’individuel et le collectif. Les initiatives nationales de renouvellement des services assurés par les syndicats sont nombreuses. Nous avons construit des réseaux tels que “Mobilnet” pour le conseil aux cadres mobiles et “Femanet” pour les femmes cadres. Ils correspondent bien à cette volonté de répondre à des besoins individuels divers et simultanément de s’appuyer sur les résultats des échanges pour résoudre les problèmes qui nécessitent un traitement collectif.

C’est sur cette lancée qu’EUROCADRES aborde une nouvelle décennie, porté par des équipes qui se renouvellent, en s’appuyant sur les expériences de ces dix ans et sur les attentes des plus jeunes.