La parité est un sujet qui a percuté le monde de la recherche dans les années 1990. Une étude suédoise en 1997 montre que pour faire valider son projet de recherche, une femme doit justifier de 2,5 fois plus d’articles qu’un homme. L’Unesco et le Conseil international pour la science (CIUS) se saisissent ensuite de la question, suivis au niveau européen par un groupe « Femmes et Sciences » pour faire accepter les femmes dans les métiers de la recherche à égalité de carrière avec les hommes. En France, un Observatoire de la parité est mis en place vers 2000 afin de suivre les indicateurs de parité dans les organismes par le relais d’observateurs. Le CNRS enfin a créé en 2001 une Mission pour la place des femmes...

Mais le sujet n’est entré officiellement à l’INRA que depuis peu : un débat dans une instance paritaire en 2005, un observateur pour la parité peu visible... Le second institut public de recherche français a donc bien du mal à faire évoluer ses structures bien qu’il affirme « faire appel à la société, dans toutes ses différentes composantes ». Les femmes y sont massivement sous-représentées aux postes de responsabilité et avancent difficilement dans leur carrière, ceci étant la conséquence de cela.

Dans les postes de responsabilité, les femmes sont en 2006 : une directrice générale pour le collège de direction (9 hommes), 11 % à la tête des centres et départements et 17 % à la tête des unités de recherche. Les membres nommés dans les conseils ont stagné longtemps en dessous de 15 % de femmes. Or, la dernière composition de cet automne donne 26 % de femmes parmi les membres nommées dans les conseils scientifiques des départements de recherche ce qui représente une petite évolution. On est cependant encore bien en deçà d’une vraie parité de représentation, la composition des membres élus serait plus représentative du vivier potentiel avec un pourcentage de 37 % de femmes élues. Quant aux membres nommés des conseils scientifiques de centre (l’INRA est composé de départements de recherche et de 21 centres), ils comprennent 22 % de femmes en moyenne mais on voit encore de nombreux centres (7) dont le pourcentage est 100 % masculin...

Il semble donc qu’une évolution s’amorce maintenant sur la parité, soit forcée par la pyramide des âges, soit du fait de la direction, soit grâce à la pression sociale – syndicale CFDT, ministère par le biais de la Mission pour la parité dans la recherche et l’enseignement supérieur, pressions individuelles de femmes chercheuses... C’est probablement la conjonction de tous ces facteurs qui fera avancer l’ensemble mais il semble que nous nous heurterons encore un certain temps à un appareil tenu par une génération d’hommes et de quelques femmes très éloignés de (sinon réfractaires à) ces questions de parité.

Or pour cette génération qui gère actuellement les instances de réflexion et d’évaluation, nous sommes sur des schémas mentaux disons désuets. L’exercice du précédent mandat dans l’instance de suivi des carrières de chercheurs (CAPN) en témoigne. En effet, un processus savant d’évaluation et de suivi de la compétence des chercheurs peut conduire à porter à l’attention de cette instance un certain nombre de cas. En l’occurrence 10 femmes et 2 hommes sur l’exercice. Or, l’observatrice CFDT démontre que bien d’autres chercheurs hommes dans l’Institut auraient pu faire l’objet de cette alerte pour carence de production scientifique et que parmi les 10 femmes ainsi stigmatisées quelques-unes avaient des dossiers plutôt corrects. En revanche, la majorité de ces femmes avaient des enfants et certaines travaillaient en temps partiel. Il semble qu’il n’était pas possible – pour un certain nombre de personne – de penser recherche et vie de famille. Pour un certain nombre de gens, il est beaucoup plus aisé de mettre en doute la compétence d’une femme que celle d’un homme.