Quelques rappels de principes. Le système d’enseignement français est fondé sur cinq grands principes. L’instruction est obligatoire entre six et seize ans. Elle est laïque et gratuite. Les personnels et les élèves sont soumis à une neutralité d’opinion. La liberté de l’enseignement est reconnue aux établissements privés1. Le préambule de la Constitution de 1946, repris en 1958, déclare : « La nation garantit l’égal accès de l’enfant et de l’adulte à l’instruction, à la formation professionnelle et à la culture ». L’école de Jules Ferry est la formation d’esprits rationnels et critiques, admettant une certaine critique des pédagogues nourris avec le développement de la psychologie infantile. « D’un côté, l’enfant au centre, son intelligence, sa curiosité naturelle, son épanouissement ; de l’autre, l’autorité du maître, la discipline, l’effort, le mérite »2.

Depuis quelques années, le système éducatif est comparé à ceux des autres pays, ce qui décentre les débats. Plusieurs études récentes (Cnesco, Pisa, Depp3) montrent que le système éducatif ne permet pas de réduire les inégalités sociales, pire, certains établissements privés comme publics y contribuent en attirant toujours plus d’enfants issus de milieux favorisés et toujours moins d’enfants issus de milieux défavorisés ou issus de la diversité. Ils placent la France au milieu, ni dans l’excellence, ni dans la médiocrité. « Notre modèle républicain serait-il donc mauvais ? Disons plutôt, comme François Dubet, qu’il arrive peut-être au terme de son histoire. Depuis Jules Ferry, tout a changé : l’enfant, sommé dès le berceau d’être autonome, critique et connecté ; la société, simultanément mondialisée et individualiste ; l’école, autrefois sanctuaire, aujourd’hui poreuse aux problèmes sociaux »4.

La CFDT réaffirme l’importance de la formation tout au long de la vie : l’accueil de tous en formation initiale en recherchant les moyens de répondre de façon appropriée à la situation de chacun mais aussi l’accueil d’adultes de tous âges en formation continue dans des structures adaptées favorisant l’insertion et la progression professionnelle5.

La massification depuis les années soixante-dix (collège unique, développement des universités) élargit les principes de l’égalité à l’éducation à celui d’égalité des chances par l’éducation. « C’est la naissance de l’élitisme pour tous selon le mot de François Dubet »6. Cela suppose des moyens considérables pour réduire, voire faire disparaître les inégalités sociales. La tension entre démocratisation, égalitarisme et méritocratie est récurrente. Les meilleurs demeurent ceux qui sont favorisés socialement. « En maintenant un idéal d’excellence et la compétition qui permet de l’atteindre, le système scolaire continue à donner l’avantage aux classes favorisées, qui sont plus promptes à armer leurs enfants pour la réussite »7. C’est en repartant du travail des professionnels, en discutant sur les moyens apportés qu’on donne sens aux principes fondateurs.

Il s’agit donc de se tourner vers les conditions du travail des enseignants dont les obligations, la charge et temps ne cessent d’augmenter. Les conditions d’exercice du métier sont de plus en plus difficiles. Comme beaucoup d’autres cadres et agents publics, ils sont confrontés à des réformes qui se succèdent, se superposent, voire se contredisent et ce, sans aucune évaluation. Les représentants syndicaux côtoient tous les jours des collègues épuisés, excédés, surtout en fin de trimestre. Les arrêts de travail se multiplient, surtout pour les collègues en fin de carrière. Les enseignants n’ont pas le sentiment d’être écoutés, soutenus dans l’exercice de leur métier. Des grands principes éducatifs au terrain quotidien, les professionnels de l’éducation partagent le même constat que d’autres dans des secteurs différents de la fonction publique : un métier choisi par vocation qui peut devenir une simple façon de gagner sa vie.

1 : Vie-publique.fr/france-donnees-cles/ecole/systeme-educatif-francais-est-quoi-exactement.html.

2 : Scienceshumaines.com/eduquer-au-21e-siecle_fr_33123.html.

3 : Conseil National d’Evaluation du Système Scolaire, Programme International pour le Suivi des Acquis des élèves, Direction de l’Evaluation de la Prospective et de la Performance.

4 : Scienceshumaines.com.

5 : Source : FEP CFDT.

6 : « La méritocratie, une utopie féroce », Le Monde, 30 août 2018, citant les travaux de Patrick Savidan sur l’égalité de chances.

7 : Ibid.