Plus de trente ans après la publication de l’« Espace Public », thèse du philosophe allemand Jürgen Habermas, le concept a irrigué bien des recherches en sciences sociales particulièrement dans le domaine de la communication. Loin de vouloir en dresser le solde de tout compte, l’ouvrage collectif coordonné par Isabelle Pailliart tente de relever la pertinence et la force heuristique de la perspective tracée par l’héritier de l’Ecole de Francfort pour analyser les formes nouvelles que revêt cette sphère publique au sein d’une société conquise par la communication.

Réfutant le constat d’un dépérissement de cet espace public à travers une revue critique des nombreux travaux empiriques que ce concept a suscités, les auteurs de cet ouvrage à plusieurs mains s’attachent à cerner les formes de sa recomposition dans le souci d’offrir un cadre d’analyse réactualisé à certaines questions manifestement contemporaines : la logique marchande des médias, le développement du marketing politique, la redéfinition des frontières entre espace privé et espace public, la communication d’entreprise comme technique d’ingénierie sociale, la faible participation des femmes à la vie publique, les métamorphoses de la représentation politique ainsi que l’ébranlement du projet pédagogique à l’épreuve des médias.

Parmi les différentes signatures, citons celle de Bernard Miège pour une introduction magistrale à la recherche sur les médiations sociales dans l’espace public. Relevons également la contribution de Patrick Champagne sur le rôle des sondages pour une interrogation salutaire sur la construction sociale des faits statistiques et sur la construction statistique des faits sociaux.